« Chaque jour, une épidémie en Afrique »
Depuis 2023, le Dr Jean Kaseya dirige le CDC Africa, l’agence panafricaine chargée de la surveillance et de la prévention des maladies. Médecin de formation, il est à la tête d’une mission colossale : renforcer les systèmes de santé du continent, améliorer la collecte de données épidémiologiques, et développer la production locale de vaccins.
« Mon plus grand défi, chaque jour à 4h du matin, c’est de savoir où se trouve la prochaine épidémie, et comment y répondre rapidement », confie-t-il. En moyenne, l’Afrique est confrontée à une épidémie par jour, un rythme alarmant aggravé par l’insécurité et les déplacements de populations.
Répondre aux urgences sanitaires malgré les obstacles
Son pays natal, la République démocratique du Congo, illustre bien cette réalité : choléra, Mpox, Ebola et rougeole y sévissent simultanément. Face à l’absence d’infrastructures, le CDC Africa mise sur la formation locale, la préposition des ressources médicales, et la digitalisation des systèmes d’alerte pour intervenir efficacement.
Concernant le choléra, qui touche actuellement 23 pays africains, la stratégie repose sur deux piliers : prévention par l’accès à l’eau, aux latrines et à l’éducation, et réponse rapide par la vaccination, les traitements et l’isolement des cas. Ces efforts ont permis de réduire significativement la mortalité, mais le Dr Kaseya insiste : « Tant que les gouvernements n’agiront pas sur les causes structurelles, les flambées continueront. »
Vers une souveraineté sanitaire africaine
Lors du Sommet mondial de la santé à Berlin, il a exprimé ses inquiétudes après le retrait de l’USAID, qui a laissé un vide brutal. Mais il voit aussi une opportunité : « Les pays africains ont compris que l’aide peut se tarir à tout moment. Ils commencent à créer leurs propres mécanismes de financement. »
Il salue néanmoins les engagements internationaux : 1 milliard de dollars pour le Global Fund, 600 millions pour Gavi, 100 millions pour Cepi. « L’Allemagne montre que la solidarité est encore possible, même en période difficile. »
Enfin, l’un de ses objectifs les plus ambitieux reste la fabrication de vaccins en Afrique. « J’espère qu’un jour, mes petits-enfants seront vaccinés avec des produits africains. Et je pourrai leur dire : j’y ai contribué. »
