LES FAITS REPROCHÉS À ALPHA CONDÉ ET ALS. DANS LE DOSSIER TRANSMIS AU P.G. PAR LES AVOCATS DU FNDC.
Dans la correspondance adressée au Procureur général près la Cour d’Appel de Conakry, signée William BOURDON et Vincent BRENGARTH, avocats du FNDC, l’ex dictateur Alpha Condé et ses collaborateurs et promoteurs du coup d’État constitutionnel du 22 mars et du hold up électoral du 18 octobre, indiquent que « selon les informations en possession du FNDC, les responsables de la situation actuelle et des crimes commis au cours de la période considérée apparaissent comme étant :
• Alpha Condé, Chef de l’Etat, Président de la République, Commandant des forces armées guinéennes.
En effet, le Président de la République, certains membres de son gouvernement et de hautfonctionnaires, se sont ouvertement engagés dans un projet irrégulier de troisième mandat aux conséquences aussi néfastes qu’imprévisibles, en violation flagrante de la Constitution et de la volonté exprimée par le peuple de Guinée dans son écrasante majorité au sein du FNDC.
Des indicateurs bien identifiés permettent de repérer les germes de la violence déjà installée par les forces de défense et de sécurité (gendarmes et policiers) qui bénéficiaient d’une impunité totale en complicité avec les tenants du pouvoir de Conakry.
Il en est ainsi des propos belliqueux tenus par le Président de la République Alpha Condé, au siège du Parti RPG- arc-en-ciel, le 24 mars 2019, appelant explicitement ses propres populations à l’affrontement. De tels propos, indignes de la fonction présidentielle, ont fortement questionné son rôle de garant de la Constitution et de protecteur de la paix sociale.
Son ministre de la sécurité et de la protection civile, Alpha Ibrahima Keira, s’est illustré en adoptant un registre tout aussi guerrier. Au siège de son Parti, le RPG- arc-en-ciel, il déclarait le 21 septembre dernier que « …tous ceux qui veulent troubler l’ordre public trouveront les institutions de la République sur leur chemin. L’ordre public sera maintenu vaille que vaille, coûte que coûte », établissant ainsi un amalgame tendancieux entre les manifestations pacifiques et les troubles à l’ordre public. Il est fondamental de relever que des propos similaires avaient été tenus à la veille des évènements du 28 septembre 2009, aboutissant à une véritable tragédie humaine.
Les forces de l’ordre et de sécurité ont déjà eu recours, dans un passé plus récent, à la répression sanglante de manifestations non-violentes considérées de manière abusive comme des troubles à l’ordre public. Des postes armés militaires (PA) ont été installés en plusieurs endroits de la capitale Conakry, le déploiement des unités d’élite de l’armée Guinéenne comme entre autres : le bataillon autonome des troupes aéroportées (BATA) et les forces spéciales pour intimider et dissuader les personnes qui oseraient manifester pacifiquement leur opposition au pouvoir en portant des revendications politiques, syndicales, sociales et économiques dans la rue ou sur la place publique. Une interdiction générale de manifestation a été décrétée sur toute l’étendue du territoire nationale depuis mars 2020 avec une application toutefois sélective, puisqu’inopérante s’agissant des zones et militants du parti au pouvoir.
• Dr Ibrahima Kassory Fofana Premier Ministre/Chef du Gouvernement, Naby Youssouf Kiridi Bangoura, Secrétaire général de la Présidence, Tibou Camara Conseiller spécial de Monsieur Alpha Condé, Baidy Aribot 2ème vice-gouverneur de la BCRG, Général Toumany Sangaré, Directeur Général de la Douane, Aboubacar Sylla Ministre des transports/porte-parole du gouvernement, Amara Somparé, Ministre de la communication, Mohamed Lamine Bangoura, Président de la Cour constitutionnelle, pour, d’une part, avoir planifié la tenue du double scrutin, d’autre part, en avoir organisé la fraude en sachant que des crimes et des violences illégitimes seraient commis contre les citoyens membres du FNDC à cette double consultation.
• Dr Mohamed DIANE, Albert Damantang CAMARA, Mory Doumbouya, le Général Boureima CONDE, respectivement Ministre de la défense nationale, Ministre de la sécurité, Ministre de l’administration du territoire qui, chacun en ce qui les concerne, ont exercé des fonctions hiérarchiques sur les forces militaires et de sécurité habilités à ce titre, de facto et de jure, à donner des ordres afin de prévenir les infractions commises et d’en sanctionner les auteurs, ce qu’ils se sont volontairement abstenus de faire.
• Amadou Damaro CAMARA, Membre du RPG ARC EN CIEL, Makissa Camara Directeur national des impôts, Papa Koly Kourouma, Ministre de l’hydraulique, Malick Sankhon, Directeur Général de la CNSS dont les déclarations publiques ont favorisé et encouragé les décisions ethniques à l’origine desquelles des crimes et des violences ont été planifiés notamment dans les villes de Nzérékoré, Conakry, Fria, Boké. Il est évident que les autorités guinéennes se sont affranchies, avec un rare mépris, des conseils, recommandations et avertissements formulés notamment par les Nations-Unies, l’Union européenne, les Ambassades des Etats-Unis et de la France, dans une déclaration commune du 5 novembre 2019, et la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples, qui a relevé, de son côté que les forces de sécurité « n’ont pas respecté les normes et standards internationaux en matière d’usage de la force ».
Les manifestations contre le troisième mandat ont été réprimées dans le sang faisant près d’une centaine de morts sans qu’aucune enquête ne soit diligentée pour identifier et sanctionner les auteurs de ces crimes.
Par voie de conséquence, il convient désormais, pour prévenir les violations futures des droits de l’homme, de punir les responsables de ces actes répréhensibles, aux fins de les contraindre à respecter les obligations qui leur incombent en vertu du droit international, y compris le droit international humanitaire, le droit des droits de l’homme et des instruments internationaux (Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, Pacte international des droits civils et politiques, Charte africaine des droits de l’homme et des peuples, Accords de Cotonou) qui en assurent la protection.
Ainsi donc, Nous conseils du FNDC, réitérons notre entière disponibilité, en étroite collaboration avec nos homologues guinéens, à participer à toutes les phases de la procédure d’information judiciaire ouverte auprès des différents parquets de Conakry.
Nous ne pouvons que nous réjouir de l’ouverture d’une information judiciaire concernant les agissements dénoncés à l’occasion de notre signalement auprès de la CPI. Nous appelons de nos vœux que ce changement favorise la transition démocratique tant attendue en Guinée et qu’il instaure les conditions d’une totale collaboration avec votre parquet.
Nous profitons enfin de la présente pour vous réaffirmer notre souhait de vous rencontrer et pour vous indiquer que dans le cadre du mandat qui nous est confié par le FNDC, nous resterons vigilants quant à l’évolution de la procédure judiciaire sur place.
Nous vous joignons une copie de la liste exhaustive de ces personnalités du régime de Monsieur Alpha Condé.
Nous restons naturellement à votre disposition pour toute information complémentaire. Nous vous précisons enfin qu’une demande a également été adressée à la Cour Pénale Internationale depuis un an et demi.
Veuillez agréer, Monsieur le procureur, l’expression de notre très haute considération.