L’illusion des mouvements de soutien au CNRD
Dans le théâtre tragique de la transition guinéenne, un spectacle affligeant se joue sous nos yeux, une mascarade orchestrée avec cynisme : celui de la prolifération de mouvements dits de « soutien » au Président de la transition, Mamadi Doumbouya.
Une liste interminable, quasi caricaturale, de noms pompeux et d’associations sans substance, criant à tue-tête un amour de façade, construit à coup de slogans creux et de promesses fantômes.
De « Génération Patriote » à « Doumbouya ou rien », de « La jeunesse a compris » aux « Gazelles du CNRD », des coalitions je ne sais de qui et de quoi, Foutah Fotti et autres…
Ces appellations rivalisent d’audace pour dissimuler une vérité implacable : celle d’un peuple instrumentalisé, de cadres vendus, de jeunes utilisés comme tremplin pour une propagande d’État.
Il ne s’agit point de patriotisme, mais bien d’une danse macabre autour du pouvoir, où chacun veut tirer profit des miettes jetées par le sommet.
Pourquoi une telle profusion de mouvements ?
Quelle est la finalité de cette cacophonie orchestrée sinon celle de noyer le pays dans une illusion d’unanimité, d’étouffer la pensée critique et de réduire au silence toute voix dissidente ?
En vérité, ces groupements traduisent moins un soutien sincère qu’un besoin désespéré de reconnaissance, dans une société où la dignité se troque contre un téléphone, un tee-shirt, un billet ou un bol de riz.
Pendant que l’on nous vend des rêves de grandeur et de prospérité à venir notamment à travers l’horizon brumeux de Simandou, ce Saint-Graal que l’on brandit comme un mirage.
Les réalités sur le terrain sont d’une noirceur inquiétante :
Les médias se ferment, un à un, comme on éteint des lumières dans une pièce où l’on veut cacher la poussière.
La médiocrité est élevée au rang de vertu, la mendicité institutionnalisée comme mode de survie.
Les enlèvements se multiplient, dans l’indifférence quasi générale, comme si la vie humaine n’avait plus de valeur.
Des morts s’ajoutent à la liste des martyrs silencieux de cette transition.
Le droit de manifester n’est plus qu’un souvenir flou, perdu dans les discours mensongers de paix et de stabilité.
Les opposants politiques sont exilés, emprisonnés, réduits au silence, pendant qu’on glorifie les discours vides dans les stades remplis par la peur.
Et dans cette grande hypocrisie de la « refondation », on prêche la lutte contre la corruption d’un côté, en exhibant des arrestations télévisées et des procès spectacle.
De l’autre, on distribue les deniers publics à coups de milliards, de véhicules 4×4, de fêtes populaires déguisées en campagnes de propagande.
Mais la question demeure : d’où vient cet argent ?
Le peuple n’est pas dupe. Il voit, il sent, il souffre.
Le silence n’est pas consentement ; c’est souvent l’expression d’une peur profonde, d’un désespoir tissé de lassitude.
Mais il arrivera un jour où la dignité parlera plus fort que la peur.
Un jour où les mouvements sincères, ancrés dans la justice, la vérité et la liberté, balaieront les fausses alliances et les applaudissements achetés.
Car la Guinée mérite mieux que des slogans.
Elle mérite des actes, de la transparence, et une vraie refondation. Et non cette farce tragique où le pouvoir se nourrit des illusions qu’il fabrique lui-même.
Oumar Sadio Diallo
