Contre La sansure

Mamadi Doumbouya face à l’Histoire : le dernier combat d’un soldat

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Le 5 septembre 2021 restera à jamais gravé dans la mémoire collective comme le jour où la Guinée a retrouvé sa dignité. Ce matin-là, un jeune colonel, Mamadi Doumbouya, prenait la tête d’un mouvement militaire que beaucoup voyaient comme une délivrance. En quelques heures, il mettait fin à une présidence jugée autoritaire et redonnait au peuple un souffle d’espoir. Quatre ans plus tard, à la veille de la présidentielle de décembre 2025, cet espoir vacille, suspendu à une seule question : le Président tiendra-t-il sa parole de ne pas se présenter ?

Car au-delà des infrastructures inaugurées, des routes bitumées et des projets miniers relancés, l’Histoire retiendra avant tout la fidélité d’un homme à sa promesse. Gouverner, c’est construire, certes, mais diriger avec honneur, c’est savoir s’arrêter. Les ponts s’effondreront, les routes s’useront, mais la parole tenue, elle, traverse les générations.

Le Président Doumbouya a su incarner un renouveau : la rigueur militaire, la lutte contre la corruption, la relance du Simandou, le désenclavement des régions. Autant d’actions qui méritent d’être saluées. Mais le défi qui s’impose à lui aujourd’hui n’est plus d’ordre matériel : il est moral. Ce n’est plus le combat du capitaine devenu chef d’État, mais celui de l’homme face à la tentation du pouvoir — la même qui a fait chuter tant d’autres avant lui.

Ceux qui, aujourd’hui, lui murmurent qu’il est “indispensable”, ne servent pas la Guinée : ils servent leurs intérêts. Ils veulent transformer un héros du sursaut national en simple continuateur du cycle qu’il avait juré de briser. Ne pas céder à ces sirènes, ce serait offrir à la Guinée le plus grand des héritages : un exemple.

L’histoire du monde est riche en figures qui ont compris, à temps, la valeur du renoncement. George Washington, après avoir vaincu l’Empire britannique, refusa la couronne qu’on lui proposait et quitta le pouvoir au terme de son second mandat. C’est ainsi qu’il devint le “Père de la Nation américaine”. Mandela, lui aussi, refusa le pouvoir à vie pour préserver la démocratie sud-africaine. Ces hommes sont devenus immortels non pas pour avoir régné, mais pour avoir su partir.

Monsieur le Président, la Guinée vous offre la même occasion : celle de devenir non pas un chef de transition, mais un père fondateur. Vous avez juré, devant Dieu et devant le peuple, de ne pas être candidat à la présidentielle qui mettra fin à la transition. Tenir ce serment, c’est sceller votre nom dans la grandeur, celle qui ne s’efface ni par le temps ni par la politique.

Vous êtes jeune, l’avenir est devant vous. Quitter le pouvoir aujourd’hui ne serait pas une retraite, mais un triomphe. Ce serait l’acte d’un soldat qui reste fidèle à son serment, d’un patriote qui place la Guinée avant tout. Vous pourrez revenir, un jour, par la voie civile, fort du respect du peuple et de la légitimité morale que seule la parole tenue confère.

Mais si vous cédiez à la tentation du pouvoir, vous risqueriez de devenir un nom de plus sur la liste de ceux qui ont confondu destin et règne. L’Histoire, elle, ne pardonne pas les serments trahis.

Monsieur le Président, le peuple guinéen a besoin d’un repère, pas d’un nouveau maître. Vous avez déjà prouvé votre courage. Il ne vous reste qu’à prouver votre sagesse. Tenir votre parole, ce n’est pas renoncer : c’est vaincre.

Et ce serait, sans doute, votre plus belle victoire.

Abdoulaye J. Barry

Citoyen guinéen patriote et concerné.

Spécialiste en Gestion Financière

Membre Permanent de la Faculté d’Administration des Affaires du Collège Universitaire de Portland

Chercheur et Promoteur de Langue et Cultures Africaines.

ajbarry@live.com

Conakry, Guinée

In. https://www.lindependant.org/actualites-mamadi-doumbouya-face-a-lhistoire-le-dernier-combat-dun-soldat/

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