Jeudi, la ville de Karamoko Alpha s’est transformée en kermesse politique.
Sous un soleil impitoyable, les tambours battaient au rythme d’une ferveur importée : “Labé réclame ta candidature, Général !” criait-on à gorge déployée.
Les mains brandissaient des pancartes, les poches vidaient des billets, et la dignité s’évaporait dans la poussière rouge.
Neuf cent millions de francs, fièrement annoncés comme “caution citoyenne” pour un homme dont la République entière subventionne déjà la démesure.
Et le lendemain, comme un signe du ciel ou une leçon du destin, Labé a pris feu.
Pas un feu symbolique — non.
Un vrai brasier, un incendie qui lèche les murs, qui dévore les boutiques, en plein centre des affaires, pendant que les habitants, désarmés, formaient une chaîne humaine de seaux d’eau. Labé, grande cité d’histoire, a découvert qu’elle ne possédait ni service de sapeurs-pompiers, ni camion-citerne, ni même une lance à incendie d’État.
Mais elle avait des banderoles ! Des T-shirts ! Des pancartes plastifiées flambant neuves !
On nous dit que Labé soutient le général.
Mais le général, lui, soutient quoi ?
Certainement pas les toits qui brûlent.
Certainement pas les enfants qui suffoquent dans la fumée.
Certainement pas la vérité qui s’enflamme chaque jour dans nos consciences.
Il faut croire qu’en Guinée, les villes qui acclament finissent toujours par s’enflammer.
C’est la loi de la mise en scène : plus on applaudit la poudre, plus la cendre recouvre le peuple.
Alors, moi, fils de Labé, je ne réclame aucune candidature.
Je réclame juste une citerne d’eau.
Parce qu’à ce rythme, c’est le pays entier qui brûlera avant le scrutin.
Alpha Issagha Diallo
Fils de Labé, témoin du réel
Incendiaire de la bêtise nationale
Les images sont tirées de africaguinee.com (https://www.africaguinee.com/grand-marche-de-labe-le-pire-evite-de-justesse/)