Ousmane Gaoul Diallo : quand la loyauté devient un fardeau (Par Elhadj Aziz Bah)
Les insultes, les agressions et la diabolisation d’Ousmane Gaoul Diallo traduisent moins un désaccord politique qu’un malaise profond de la société guinéenne : notre incapacité à distinguer l’homme de la fonction, la loyauté du reniement, et le débat d’idées du règlement de comptes. En s’acharnant sur ceux qui osent assumer leurs responsabilités, la Guinée se condamne à rejouer éternellement le même scénario : celui d’un peuple qui s’attaque aux siens pendant que le véritable ennemi, le système, continue de triompher.
Winston Churchill disait : « Le problème de notre époque, c’est que les hommes ne veulent pas être utiles, mais importants. »
Trop, c’est trop. La Guinée étouffe dans ses contradictions et s’égare dans des combats de personnes. Nous avons fait de la calomnie un sport national, de la haine un argument politique, et du lynchage médiatique une distraction populaire. Les récentes attaques injustes et injustifiées contre Ousmane Gaoul Diallo en sont la parfaite illustration d’une société qui peine encore à distinguer la conviction de la rancune.
Qu’a donc fait Ousmane Gaoul pour mériter une telle campagne d’hostilité, lui qui fut l’un des visages les plus courageux de la résistance contre le régime d’Alpha Condé ? Faut-il rappeler qu’il a connu la prison sans procès, la persécution et l’humiliation, simplement pour avoir défendu la liberté et la justice ? Sa libération avait coïncidé avec l’avènement du CNRD, un moment d’espérance que nous avions presque tous salué.
Lorsque Ousmane fut nommé ministre et porte-parole du gouvernement, beaucoup, y compris au sein de l’UFDG, voyaient en lui un symbole de réconciliation et de continuité du combat pour le changement. Le contexte politique a depuis évolué, les lignes ont bougé, les alliances se sont effritées. Mais doit-on pour autant effacer la cohérence d’un homme qui assume, avec constance, la fonction qu’il occupe ?
Être porte-parole d’un gouvernement n’est pas un exercice de popularité, mais de responsabilité. Cela exige loyauté, maîtrise et rigueur. Ousmane Gaoul a fait le choix de servir dans le cadre qui est le sien, et il le fait sans renier ses convictions profondes. Ce choix peut être discuté, mais il ne mérite pas la haine.
Les injures proférées contre lui, les agressions à son encontre au Liberia ou les humiliations publiques à New York sont indignes d’un peuple qui se dit mûr politiquement. Faut-il rappeler qu’à chaque époque, la Guinée a reproduit les mêmes erreurs ? Sous le régime de Lansana Conté, le ministre Alpha Ousmane Diallo avait été injustement vilipendé pour le déguerpissement de Kaporo-Rails. Aujourd’hui, c’est Ousmane Gaoul qu’on accuse pour la récupération de la maison de Cellou Dalein Diallo, alors même que ces décisions relèvent du Conseil des ministres.
« L’histoire se répète, d’abord comme tragédie, ensuite comme farce », écrivait Karl Marx. Nous semblons condamnés à tourner en rond, à refaire les mêmes procès d’intention, à détruire les nôtres dès qu’ils franchissent un seuil de responsabilité.
Je n’écris pas ces lignes pour défendre un homme, mais un principe. Celui de la justice, de la cohérence et de l’élévation du débat. J’ai moi-même souvent critiqué la junte dans mes écrits, dénoncé ses dérives et ses défaillances, mais jamais je n’ai voulu réduire la Guinée à un affrontement d’individus. Car ce n’est pas en détruisant des hommes qu’on bâtit une nation, c’est en corrigeant les systèmes.
Aujourd’hui, c’est Ousmane Gaoul qu’on vilipende. Demain, ce sera un autre. Tant que nous nous acharnerons sur des figures plutôt que sur les causes, le système corrompu et décadent continuera de prospérer. Il se nourrit de nos divisions, de nos émotions mal orientées, et de notre incapacité à distinguer l’essentiel de l’accessoire.
« Le véritable ennemi, disait Nelson Mandela, ce n’est pas l’homme en face de vous, mais le système qui le manipule. » Voilà le cœur du problème guinéen : nous combattons des personnes au lieu de combattre le mal qui les dépasse.
Alors oui, trop c’est trop. Cessons de juger les hommes selon nos humeurs et nos appartenances. Regardons plutôt les idées, les valeurs, la vision. Débarrassons-nous des réflexes de haine et de vengeance, et affrontons le vrai combat : celui contre l’injustice, la médiocrité et la corruption.
Ce jour-là, peut-être, la Guinée cessera de se déchirer pour enfin s’élever.
A bon entendeur salut ! D’ici-là, merci de contribuer au débat.
Elhadj Aziz Bah

Note de l’auteur : Acceptons la pluralité d’idées. Pas d’injures, et rien que d’arguments.
