Contre La sansure

Qui sont les acteurs étrangers impliqués dans la guerre civile au Soudan ?

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La guerre civile au Soudan fait toujours rage, plus de deux ans et demi après son déclenchement, et sa durée est en partie due à l’ingérence d’acteurs étrangers qui apportent un soutien politique et militaire aux belligérants.

Selon les organisations de défense des droits humains, plus de 150 000 personnes ont été tuées et plus de 12 millions déplacées.

L’armée et les Forces de soutien rapide (FSR), groupe paramilitaire, continuent de recevoir un approvisionnement illimité en armements, malgré les restrictions internationales sur les livraisons d’armes.

Les intérêts divergents des acteurs régionaux ont transformé ce conflit en une guerre complexe qui menace désormais d’aggraver l’instabilité dans la Corne de l’Afrique et au-delà.

Le carnage de la guerre a été manifeste lors de la récente prise d’el-Fasher, capitale de la région du Darfour occidental, par les FSR, où le groupe paramilitaire a été accusé d’avoir perpétré un massacre.

Cet article explicatif examine les acteurs extérieurs liés à un conflit qui a engendré l’une des pires crises humanitaires au monde.

Qui soutient l’armée ?

L’armée soudanaise bénéficierait du soutien de nombreux acteurs, notamment l’Égypte, la Turquie, l’Iran, la Russie et l’Érythrée, accusés de lui fournir une aide militaire directe.

Le premier pays visité par le chef d’état-major de l’armée soudanaise, le général Abdel Fattah al-Burhan, après le début du conflit en avril 2023, fut l’Égypte. De nombreux rapports ont depuis lors confirmé le soutien du Caire à l’armée.

Les Forces de soutien rapide (FSR) et leur chef, le lieutenant-général Mohamed Hamdan Dagalo (Hemedti), ont accusé à plusieurs reprises l’Égypte de « fournir des armes à l’armée, notamment des avions de combat ».

La dernière accusation en date contre le Caire remonte au 5 novembre 2025, lorsque les FSR ont affirmé que des drones, lancés depuis des « bases étrangères », avaient mené des frappes dans la région occidentale du Darfour. Les médias pro-FSR ont quant à eux affirmé que ces drones avaient été lancés depuis le territoire égyptien.

L’Égypte avait auparavant nié toute implication directe dans le conflit.

La Turquie a officiellement adopté une position neutre, mais aurait également fourni à l’armée soudanaise des drones qui ont joué un rôle déterminant dans sa reprise des régions centrales, notamment Khartoum, aux mains des RSF. En mars 2025, les médias turcs ont rapporté qu’Ankara avait fourni des drones de combat à l’armée soudanaise, contribuant ainsi à la prise de Khartoum. Certains médias turcs ont également appelé Ankara à renforcer son soutien à l’armée soudanaise.

En mars 2025, le Washington Post, quotidien américain, a rapporté que Baykar, la plus grande entreprise d’armement turque, avait fourni des armes létales, dont des drones et des centaines d’ogives, à l’armée soudanaise.

Le 6 novembre, l’organisation de presse indépendante Middle East Eye a rapporté que la Turquie et l’Égypte avaient intensifié leur soutien à l’armée après la prise d’el-Fasher par les RSF.

Divers médias ont également affirmé que l’armée recevait des avions de chasse et des drones de Russie et d’Iran.

En octobre 2024, le chef des RSF, Hemedti, a accusé Téhéran de soutenir militairement l’armée. L’Iran, qui a rétabli ses relations diplomatiques avec le Soudan en octobre 2023 après une interruption de sept ans, n’a pas répondu à ces allégations.

L’agence de presse américaine Bloomberg a rapporté en octobre 2024 que l’Iran et la Russie avaient « discuté avec l’armée soudanaise de la construction de bases militaires » sur la côte soudanaise de la mer Rouge.

L’Iran a démenti ces allégations, mais la Russie a signé un accord avec le gouvernement militaire soudanais en février 2025 pour l’établissement d’une base navale dans le pays. Moscou poursuivait cet objectif depuis 2017.

L’Érythrée voisine n’a pas non plus caché son soutien à l’armée soudanaise dans ce conflit. En janvier 2025, une milice soudanaise pro-armée a déclaré que ses combattants avaient reçu un entraînement et des armes de l’Érythrée.

L’Arabie saoudite serait également favorable à l’armée, mais elle a officiellement adopté une position de neutralité.

Qui soutient les RSF ?

Les Émirats arabes unis (EAU) auraient fourni des armes, du matériel médical et d’autres formes de soutien aux Forces de soutien rapide (RSF) tout au long du conflit.

Plusieurs rapports, appuyés par des experts de l’ONU, indiquent que les EAU ont acheminé des véhicules de combat, des drones et d’autres armements lourds aux FSR via le Tchad, le Soudan du Sud, la Libye, la République centrafricaine (RCA) et la Somalie.

Les Émirats arabes unis sont considérés comme le principal soutien étranger des Forces de soutien rapide (FSR), leur fournissant une assistance militaire.
Les Émirats arabes unis sont considérés comme le principal soutien étranger des Forces de soutien rapide (FSR), leur fournissant une assistance militaire. Crédit photo, Site web Akhbar du Soudan

Le Kenya a accueilli à plusieurs reprises des dirigeants des RSF et des activités politiques.

En février 2025, le Kenya a organisé une réunion politique de haut niveau au cours de laquelle les RSF ont formé un gouvernement parallèle, ce qui a incité le gouvernement militaire soudanais à rappeler son ambassadeur à Nairobi.

Le gouvernement militaire a rompu ses relations diplomatiques avec les Émirats arabes unis, le Kenya et le Tchad en raison de leur soutien présumé aux RSF. Il a également accusé l’Armée nationale libyenne (ANL) de soutenir le groupe.

L’armée soudanaise a également accusé le Soudan du Sud de « fournir des mercenaires aux RSF » et de contribuer aux soins de ses blessés.

Les Émirats arabes unis, le Kenya, le Tchad, le Soudan du Sud et l’ANL ont tous nié soutenir les RSF.

Ventes d’armes et mercenaires

Certains pays, sans être directement impliqués dans le conflit, sont devenus une source de mercenaires et un marché d’armes pour les belligérants.

En octobre 2025, le Pakistan et l’armée soudanaise ont signé un contrat de défense de 230 millions de dollars portant sur des avions d’entraînement, des drones, des véhicules blindés, ainsi que sur la maintenance et la production conjointe d’équipements militaires.

Plusieurs médias soudanais ont également rapporté récemment que l’armée avait cherché à acquérir des avions de chasse russes Sukhoi de pointe auprès du Kazakhstan et de l’Ouzbékistan.

Les Forces de soutien rapide (FSR) auraient déployé massivement des armes et des drones chinois, qui auraient été initialement acquis par les Émirats arabes unis avant de parvenir aux FSR.

Les Forces de soutien rapide (FSR) auraient également largement recours à des mercenaires, notamment des « experts techniques et des pilotes » originaires de certains pays africains, d’Ukraine et de Colombie.

Le 5 novembre, le ministre somalien de la Défense a déclaré que des avions non identifiés avaient décollé de l’aéroport de Bosaso, ville portuaire du nord-est du pays, pour « transporter quelque chose » vers la région du Darfour, au Soudan.

Le ministre n’a fourni aucun autre détail, mais des informations font état de l’utilisation par les Émirats arabes unis de cet aéroport somalien pour acheminer des armes et des mercenaires aux FSR.

Et les pourparlers de paix ?

Ces derniers mois, les États-Unis ont intensifié leurs efforts diplomatiques dans le cadre du mécanisme du Quad, qui inclut l’Arabie saoudite, l’Égypte et les Émirats arabes unis, afin d’obtenir une trêve humanitaire de trois mois, suivie d’un cessez-le-feu permanent.

Cependant, des divergences non précisées entre les pays arabes lors des négociations compromettent les efforts visant à instaurer une trêve. Le 6 novembre, les Forces de soutien rapide (FSR) ont accepté une proposition de trêve, mais l’armée s’y oppose encore.

L’armée conteste la présence des Émirats arabes unis aux pourparlers et aurait demandé l’inclusion de la Turquie et du Qatar.

Face au durcissement des positions des deux camps et à la consolidation de leurs alliances directes et indirectes, il y a peu d’espoir d’une fin rapide du conflit.

Par Mahammad Maalim et Yussuf Abdullahi

In. https://www.bbc.com/afrique/articles/cql9ppg54zlo

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