Bah Oury face aux manifestations : l’hypocrisie d’un ancien opposant devenu Premier ministre
Le Premier ministre guinéen Bah Oury met en garde contre les manifestations des Forces vives. Un discours qui fait débat quand on connaît son passé d’organisateur de manifestations et de défenseur des droits humains.
Bah Oury appelle aujourd’hui à la « responsabilité des acteurs politiques » face aux manifestations. Un message qui surprend quand on se souvient de son rôle en 2009. À cette époque, il était responsable du comité d’organisation des manifestations contre le régime de Dadis Camara.
Ces manifestations qu’il organisait alors avaient mal tourné. Plus de 150 personnes avaient été tuées au stade du 28 septembre. Des centaines d’autres avaient été blessées. Pourtant, Bah Oury continuait à appeler le peuple à descendre dans la rue. Il ne parlait pas de « responsabilité » à ce moment-là.
Le Premier ministre était aussi membre de l’Organisation Guinéenne des Droits Humains (OGDH). Cette organisation défendait le droit des citoyens à manifester. Elle dénonçait les violations des droits fondamentaux. Bah Oury réclamait alors la liberté d’expression. Il condamnait toute répression contre les manifestants.
Ses discours d’opposant étaient clairs : le peuple avait le droit de s’exprimer. Il fallait combattre l’autoritarisme. La démocratie était un droit inaliénable. Il dénonçait avec force les dérives du pouvoir.
Aujourd’hui, la situation a changé. Bah Oury est devenu Premier ministre du Général Mamadi Doumbouya. Cette junte militaire repousse sans cesse le retour à l’ordre constitutionnel. Elle s’inscrit dans une logique de confiscation du pouvoir. Pourtant, l’ancien défenseur de la démocratie la sert fidèlement.
Le contraste est saisissant. Hier, Bah Oury disait : « Le peuple a le droit de manifester contre l’injustice« . Aujourd’hui, il qualifie ces manifestations d’irresponsables. Hier, il proclamait que « les droits humains sont sacrés« . Aujourd’hui, il garde le silence sur les dérives de la junte. Hier, il voulait « combattre l’autoritarisme ». Aujourd’hui, il en est le Premier ministre.
Les Forces vives qui manifestent portent les mêmes revendications qu’en 2009. Elles demandent la justice, la transparence, le respect des droits. Elles veulent le retour à l’ordre constitutionnel. Ce sont exactement les idéaux que Bah Oury défendait quand il était dans l’opposition.

La différence ? En 2009, Bah Oury cherchait le pouvoir. Aujourd’hui, il l’a et veut le garder. Peu importent les moyens. Cette transformation révèle un opportunisme qui choque. L’homme change de principes selon ses intérêts.
Les Guinéens observent ce revirement. Ils voient celui qui organisait leurs manifestations les condamner aujourd’hui. Ils découvrent que le défenseur des droits humains d’hier sert une junte militaire aujourd’hui. Cette leçon d’opportunisme marque les esprits.
Bah Oury incarne ce que beaucoup détestent dans la classe politique guinéenne. Il représente ces dirigeants qui changent de costume selon les circonstances. Révolutionnaire quand cela arrange leurs ambitions. Conservateur quand cela sert leur confort.
Quand le Premier ministre parle de « responsabilité des acteurs politiques », les Guinéens se souviennent. La vraie responsabilité, c’est d’abord d’assumer ses contradictions. C’est de ne pas trahir les idéaux pour lesquels on a mobilisé le peuple. C’est de rester cohérent avec ses principes.
Le parcours de Bah Oury pose une question simple : peut-on faire confiance à quelqu’un qui change d’avis selon sa position ? Les Guinéens gardent cette interrogation en mémoire. Elle éclaire d’un jour nouveau les appels du Premier ministre à la responsabilité.
Abdoul Karim Diallo
CellCom UFDG
