Candeur chronique et parieurs politiques (Par Tibou Kamara)
Faut-il croire que l’optimisme des Guinéens est la preuve d’une candeur chronique, ou simplement l’expression de leur nature profonde de grands rêveurs ? Chacun se contente de très peu, se laisse facilement abuser par les apparences et semble enclin à prendre des vessies pour des lanternes.
Face à une véritable machine de guerre déployée tous azimuts et à un homme qui a démontré, à toute épreuve, sa détermination, ils sont encore nombreux à croire en un coup de théâtre possible dans un horizon pourtant étroit. Or, les challengers ne sont pas engagés dans une compétition comme les autres, ils tentent un saut périlleux dans l’inconnu.
Ce n’est pas parce qu’ils n’ont pas en face d’eux un adversaire capable de les battre haut la main dans les urnes qu’ils ont toutes leurs chances, ou qu’ils pourraient parvenir à renverser la table. Le seul qu’ils osent affronter, investi de tous les attributs du pouvoir, suffit à sceller définitivement leur sort. Ils n’ont pas conscience, ces « bébés candidats », qu’ils se sont lancés avec l’audace des imprudents et l’insouciance des parieurs dans un véritable « Fighting Game » lourd de dangers, un peu comme dans le jeu vidéo « Mortal Kombat ».
D’autres, enclins à l’exagération, parleront d’une course d’obstacles, voire contre la montre sur un champ de mines. Il faudra déjà les féliciter et les célébrer s’ils en sortent indemnes, sains et saufs. D’ici là, il faudra prier pour les retrouver intacts, au propre comme au figuré.
Moshood Abiola, milliardaire nigérian, avait remporté l’élection présidentielle dans son pays en 1993, mais la junte au pouvoir annula le scrutin avant de l’emprisonner en 1994. Il mourut en détention le 7 juillet 1998, peu après la mort soudaine de Sani Abacha. Jusqu’à aujourd’hui, un grand mystère entoure sa disparition.
En Égypte, Mohamed Morsi, à peine un an après avoir été élu Président de la République sous la bannière des Frères musulmans, fut renversé par un coup d’État à la suite de manifestations provoquées par de multiples crises. Il est décédé dans des circonstances obscures, pendant son second procès, après l’annulation de sa condamnation à mort prononcée lors du premier.
Pendant une transition militaire ou après, la démocratie est plus un défi à relever qu’un vœu réalisé.
Comme le rappelle Karl Marx : « L’histoire se répète, d’abord comme tragédie, puis comme farce. »
