Contre La sansure

Dr Faya Milimono : « Les mêmes maux qui ont conduit à la chute de Alpha Condé se sont empirés sous la gouvernance du CNRD » (déclaration )

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Dr Faya Milimono président du parti Bloc Libéral était devant la presse ce mardi 17 décembre 2024 à Conakry. Il était question de parler de la transition guinéenne qu’il considère être dans l’impasse.

Nous vous proposons un extrait de sa déclaration.

La junte, sous la direction du Général Mamadi Doumbouya, avait promis de combattre la mal gouvernance et le manque de démocratie dont souffre la Guinée, d’opérer des réformes courageuses, de protéger les droits et les libertés fondamentaux en faisant de la justice sa « boussole », de lutter contre la corruption qui gangrène le pays et son administration, de restaurer un État normal et d’assurer le retour à l’ordre constitutionnel sans participation à aucune élection des membres du CNRD, du gouvernement et du conseil national de la transition. Cependant, après plus de 3 ans de gestion unilatérale du pays, la réalité vient contredire ces engagements.

L’analyse objective de la gouvernance de la transition actuelle en Guinée montre à suffisance la mal gouvernance et le non-respect de la Charte de la transition. La transition telle que conduite aujourd’hui est un échec pour plusieurs raisons aux conséquences majeures sur le devenir de la Guinée :

1. Absence de Dialogue inclusif et de consensus politique

La Guinée a une longue histoire de coups d’État et de gouvernements autoritaires qui a engendré un climat de méfiance des citoyens envers les institutions politiques et un manque de culture démocratique. Le CNRD, qui avait promis la rupture en faisant table rase des dictatures vécues de Monsieur Ahmed Sékou Touré à Monsieur Alpha Condé, ne fait malheureusement pas exception à cette règle.

Une transition à la suite d’un coup d’état militaire n’est pas un régime normal, n’est pas un mandat; elle est illégitime et ne peut gouverner que par le dialogue et le consensus. Or depuis plus de 3 ans de transition, la junte n’a pas réussi à établir un dialogue constructif avec les acteurs politiques et la société civile, ce qui a conduit à une polarisation accrue du paysage politique.

Parmi les partis d’opposition, certains ont refusé de prendre part au dialogue proposé par la junte au lendemain du coup d’État du 5 septembre 2021. Ceux qui ont participé ont été traités avec mépris. C’est d’ailleurs au moment où se déroulait ce fameux dialogue que le CNRD et son gouvernement se sont soustraits pour négocier unilatéralement avec la CEDEAO et s’entendre sur une transition de 2 ans qui est censée se terminer le 31 décembre 2024.

Tout cela ajouté au nouveau visage que montre la junte permet de dire que le CNRD n’a jamais eu la réelle volonté de mettre en place un véritable cadre de dialogue inclusif avec l’ensemble des acteurs majeurs de la vie politique guinéenne sur la conduite de la transition. Il a toujours opté pour une gestion unilatérale de la transition. Il n’y a pas eu de consensus clair entre les partis politiques, le CNRD et les acteurs de la société civile, ce qui a entraîné une polarisation extrême et des tensions permanentes, rendant difficile la réussite de la transition.

En revanche, il est important de rappeler qu’un manque de dialogue constructif entre les différentes parties prenantes dans un processus politique a souvent mené à des confrontations et à une polarisation accrue, rendant difficile la recherche d’un consensus et de solutions durables. Le CNRD et le gouvernement de la transition manifestement s’inscrivent dans cette dynamique pour confisquer le pouvoir et s’opposer à tout retour à l’ordre constitutionnel du pays.

2. La mauvaise gouvernance et la corruption

Dès sa prise du pouvoir le 5 septembre 2021, le CNRD a promis faire de la lutte contre la corruption une de ses priorités en créant la CRIEF . Mais très rapidement, les Guinéens se sont rendus compte que la CRIEF n’est que la partie émergée de l’iceberg qui a permis de traquer les anciens dignitaires pour faits de corruption.

Malheureusement, le CNRD et son gouvernement ne font pas vraiment de la lutte contre la corruption une des priorités gouvernementales. Très tôt, la transition a été marquée par des préoccupations concernant la transparence et la bonne gouvernance, notamment des allégations de corruption et de mauvaise gestion des ressources publiques en son sein.

La corruption endémique et le favoritisme dans l’attribution des ressources et des postes ont sapé la confiance du public dans le gouvernement et les institutions, alimentant le mécontentement de la population. Les allégations de corruption au sein de la junte et le manque de transparence dans la gestion des ressources publiques ont exacerbé la méfiance du public et celle de certains sérieux partenaires techniques et financiers de la Guinée.

En guise d’exemples et selon le rapport d’enquête de la Gendarmerie nationale, plus de 700 milliards de francs guinéens (environ 82 millions de dollars) ont été détournés à la Direction Générale des Douanes de Guinée et cela sous le régime du CNRD. Plus de 300 fonctionnaires de la fonction publique sur un échantillon de 1000 ont été identifiés formellement par le Vérificateur Général avec de faux diplômes. Ces fonctionnaires ont été protégés et n’ont jamais été démis de leurs fonctions.

Quant aux richesses naturelles du pays, en particulier les mines, elles ne sont pas gérées de manière efficace et transparente. Des cas de corruption au sein des institutions publiques ont été rapportés. Par exemple, un Ministre des Mines du CNRD a été accusé de faits de corruption et d’abus de pouvoirs quand il a adressé une lettre à une société de la place pour l’octroi d’un don de deux millions de dollars US (2.000.000 USD) à l’Etat. Selon lui, ce montant de 2 millions de dollars devrait permettre à l’Administration minière de donner une suite favorable à sa requête. Le CNRD n’a pris aucune action relative à ce dossier qui est resté sans suite.


Enfin, il est clair que la concentration du pouvoir entre les mains de la junte et l’absence de dialogue inclusif ont compromis la bonne gouvernance et la transparence, ce qui pourrait entraîner des conséquences durables sur la stabilité politique et le développement économique de la Guinée.

3. Les graves violations des droits de l’Homme et des libertés.

Avec la prise du pouvoir par la junte militaire le 5 septembre 2021, la Guinée pensait enfin rompre avec le cycle infernal de violation des droits et des libertés et que les promesses faites par le Général Mamadi Doumbouya au peuple seraient tenues par rapport surtout au respect de la vie humaine et des libertés fondamentales. Hélas, c’étaient des chimères et des paroles en l’air.

Selon Human Right Watch, les droits humains sont en péril en Guinée sous le CNRD : « Les autorités militaires en Guinée ont réprimé l’opposition, les médias et la dissidence pacifique et n’ont pas tenu leur promesse de rétablir un régime civil d’ici décembre 2024. Le général Mamadi Doumbouya s’est engagé à reconstruire l’État, à respecter les droits humains et à rendre justice. Pourtant, son gouvernement a largement continué à tuer, à intimider et à museler les détracteurs ».

En trois ans de règne absolu sur le pays, des répressions violentes des manifestations et des atteintes aux droits civiques et libertés ont eu lieu avec un lourd bilan de plus de 56 militants tués par balles, des arrestations arbitraires et des enlèvements forcés dont deux célèbres militants de la société civile (Oumar SYLLA – Foniké Manguè et Mamadou Billo BAH), dans la soirée du mardi 9 juillet 2024 pour une destination inconnue. Cette arrestation a eu lieu au domicile d’Oumar SYLLA et leurs proches sont sans nouvelle d’eux.

La mort en détention arbitraire de l’ex-chef d’état-major des armées le Général Sadiba Koulibaly en juin 2024, la mort du colonel Célestin BILIVOGUI, disparu depuis près d’un an après son arrestation par des gendarmes dans les conditions atroces ainsi que des milliers de radiations tous les jours des militaires pour, dit-on, des faits de désertion.

Toutes ces graves violations sont impunies et ont pour effet d’accroître la tension entre le gouvernement et la population, rendant le climat sociopolitique encore plus difficile. Des rapports sur des violations des droits humains, des arrestations arbitraires et des répressions des manifestations pacifiques sont documentés et ont terni l’image de la transition, alimentant un climat de méfiance.

4. Les retards accusés dans le processus constitutionnel et électoral :

Les promesses de rétablissement d’un ordre constitutionnel par des élections libres et transparentes n’ont pas été respectées, ce qui suscite des frustrations au sein de la population et des acteurs politiques. En trois ans de gouvernance, la Guinée ne dispose ni de constitution comme ils l’ont promis, ni d’une administration électorale pour un retour à l’ordre constitutionnel afin de sortir le pays de l’impasse. Les promesses de réformes politiques et électorales n’ont pas été concrétisées.

Depuis trois ans, le CNRD travaille sur un avant-projet de la constitution dont la promotion a commencé dans tout le pays avec des milliards de francs guinéens dilapidés pour vulgariser un avant-projet. Il n’y a donc aucune volonté de la junte pour un retour à la démocratie et au fonctionnement normal des institutions de la République de Guinée.

5. L’Aggravation de l’insécurité
Depuis quelques mois, la Guinée vit une véritable crise sécuritaire marquée par une hausse dramatique des vols à mains armées, des viols, des enlèvements et des kidnappings, qui plongent les populations dans la peur et l’incertitude. Ces actes sont perpétrés aussi bien dans les quartiers urbains que dans les zones rurales.

Même les lieux censés être des sanctuaires, comme les écoles et les lieux de culte, ne sont plus épargnés. Jamais auparavant la Guinée n’a connu un tel niveau d’aggravation de l’insécurité, particulièrement à Conakry et dans ses environs.

Source: https://www.loupeguinee.com/2024/12/17/dr-faya-milimono-les-memes-maux-qui-ont-a-la-chute-de-alpha-conde-se-sont-empires-sous-la-gouvernance-du-cnrd-declaration/

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