Entre Nous: Dialoguer… Pourquoi pas ?
Le mot ‘’dialogue’’ avec les groupes armés djihadistes revient de façon récurrente sur les lèvres avec l’évolution de la situation sécuritaire, avec ses récentes manifestations, notamment les perturbations de l’acheminement des produits pétroliers sur le territoire national et leurs éprouvantes conséquences.
L’invite à être ouvert à la perspective du dialogue ne saurait signifier, comme certains ont tendance à croire ou à faire croire, que l’Etat arrête d’assurer ses obligations régaliennes de défense du territoire de la République, de protection des Maliens et de leurs biens. D’ailleurs cela n’est pas nouveau dans notre pays. La proposition a été faite pour la première fois, en 2014 par le Parti pour la reconnaissance nationale.
Le regretté président du Parena, Tiébilé Dramé, avait recommandé de prendre langue avec les «djihadistes» et d’appeler les terroristes étrangers à quitter notre pays.
Le fait pour un citoyen d’appeler au dialogue doit-il le faire passer pour un ennemi de son pays comme semblent croire ceux-là qui pensent avoir le monopole du patriotisme? Reste à savoir ce que cache véritablement leur hostilité à cette voie de résolution des crises. Sans exception, la Conférence d’entente nationale de 2017, le Dialogue national inclusif de 2019, les Concertations nationales de septembre 2020 après le coup d’Etat du 18 août, les Assises nationales de la refondation de 2021, le Dialogue inter-maliens de 2024
ont vivement recommandé ce dialogue. La Charte nationale pour la paix et la réconciliation prône un dialogue doctrinaire avec les groupes armés, comme en Mauritanie.
Dans la gestion d’une crise, aussi complexe de surcroît, le langage des armes ne doit pas occulter celui des arguments. Mais le constat est que ces recommandations légitimement formulées par les Maliens ont connu des évolutions contrastées. Certaines sont appliquées depuis belle lurette et produisent leurs pleins effets. Celles relatives à l’épineuse quête de paix attendent toujours.
Pourtant, du Président Amadou Toumani Touré à Assimi Goïta, en passant par Dioncounda Traoré et Ibrahim Boubacar Kéita, l’Etat a établi, à un moment ou un autre, le contact avec ces groupes via ses services spécialisés. Les libérations d’otages en constituent la parfaite illustration, y compris sous la transition en cours. Il s’agit des cas du regretté Soumaïla Cissé et de la Française Sophie Pétronin. Plus récemment, il y a eu celui du général à la retraite Cheick Ahmed Bin Maktoum bin Joumoua Al Maktoum, membre de la famille royale au pouvoir à Dubaï enlevé, le 22 ou 23 septembre 2025 dans sa ferme située à la périphérie de Bamako.
Toutes ces opérations de libération ont été effectuées au bout d’intenses négociations impliquant des services spécialisés de l’Etat et des intermédiaires investis de la confiance des parties. La complexité du péril sécuritaire requiert une « intelligence politique» pour que la paix règne sur chaque portion du territoire où les fils du Mali souffrent depuis de très longues années. Allez savoir pourquoi les esprits chagrins ne souhaitent nullement la fin de cette crise ! Malgré le nombre incalculable de tués civils et militaires, de mutilés civils et militaires, de veuves et orphelins, de déplacés et de réfugiés ! Malgré les destructions de biens publics et privés et leurs impacts incommensurables sur les activités économiques !
Espérons ne pas avoir à appeler un jour certains de nos compatriotes « les enfants gâtés de la crise » à l’instar des propriétaires des ‘’châteaux de la sècheresse’’ des ‘’milliardaires de la démocratie’’ ou des ‘’ventripotents du Sida’’.
Chiaka DOUMBIA
Source: https://www.maliweb.net/politique/chroniques/entre-nous-dialoguer-pourquoi-pas-3111480.html
