Contre La sansure

Guinée : des acteurs en conclave pour l’adoption d’une loi de réparation des victimes de violations des droits de l’homme

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L’atelier de dialogue de haut niveau pour l’adoption d’un cadre légal en faveur du droit à la réparation administrative des victimes de violations des droits de l’homme en Guinée s’est ouvert ce mercredi 4 décembre 2024 à Conakry.

Cet atelier de deux jours fait suite aux 45 recommandations des assises nationales. Il a été lancé en vue de la prise en compte de la réparation envers les victimes depuis l’indépendance de notre pays. La démarche vise à réfléchir à une meilleure conclusion pour soumettre une loi au CNT en vue de son adoption. La rencontre a réuni des experts, des représentants d’associations de défense des droits humains ainsi que des victimes de violations des droits de l’homme, a appris sur place Guineematin.com à travers un de ses reporters.

Dans son discours, la Secrétaire générale du Ministère de la Justice et des Droits de l’Homme, Irène Marie Hadjimalis, a souligné l’importance de cet atelier dans la mise en œuvre des recommandations issues des assises nationales.

Irène Marie Hadjimalis, secrétaire générale du ministère de la Justice et des Droits de l’Homme

« Depuis l’indépendance de la Guinée, le 2 octobre 1958, notre pays a connu plusieurs cas de violations des droits de l’homme liés à des épisodes politiques et sociaux. Engagé pour le renforcement de la cohésion sociale et la réconciliation nationale, depuis sa prise de responsabilité, le Général d’armée Mamadi DOUMBOUYA, Président de la République, Chef de l’État, Chef suprême des Armées, a instruit l’organisation des assises nationales afin de permettre à tous les citoyens de s’exprimer librement sur les dérives du passé. Suite à ces assises, 45 recommandations ont été formulées, parmi lesquelles la question de la réparation des différents cas de violation des droits de l’homme, y compris celui des douloureux événements du 28 septembre 2009. Dans la perspective de la mise en œuvre de certaines recommandations, un projet de loi et son décret d’application sont en cours d’élaboration avancée par le département de la Justice et des Droits de l’homme, en collaboration avec les associations de défense des droits de l’homme et des associations de victimes, et avec l’appui technique du Fonds Mondial pour les Survivants. Ces avant-projets de textes instaurent un mécanisme administratif permettant de faciliter l’accès aux réparations des victimes de violations des droits de l’homme en Guinée. Aussi, ils auront vocation à compléter la législation déjà existante sur le droit à réparation judiciaire. Ce sont ces différents avant-projets qui vous sont soumis à l’occasion du présent atelier de haut niveau pour discussion et amendement. Au regard de la qualité des participants ici présents, j’ose croire que ces échanges permettront de les affiner et de les mettre en harmonie avec nos différentes préoccupations. Au regard de l’urgence qui s’attache à l’adoption de ces instruments par le Gouvernement et leur soumission au CNT, nous n’avons plus de temps à perdre, d’autant plus que de nombreuses victimes sont dans l’attente de prise en charge. C’est pourquoi je vous exhorte, Mesdames et Messieurs les participants, à vous impliquer individuellement et collectivement dans les débats interactifs et dans les travaux de groupe, afin de comprendre tous les contours de ces deux textes et nous faire de fortes recommandations pour nous permettre d’aller plus vite vers l’adoption de la Loi de réparation », a-t-elle déclaré.

Pour sa part, Souleymane Bah, président de l’OGDH a rappelé l’importance des conclusions de cette loi qui vont sortir de cet atelier afin de rendre justice aux victimes.

Souleymane Bah, président de l’Organisation Guinéenne de Défense des Droits de l’Homme et des Citoyens

« Je pense que c’est une excellente chose. Comme vous le savez, depuis l’indépendance de ce pays, il y a eu tellement de violences qui n’ont jamais été jugées, qu’il n’y a jamais eu de justice pour toutes ces victimes. Maintenant, avec les événements du 28 septembre 2009, nous avons commencé à nous battre pour qu’il y ait justice. Cette justice a été faite en partie, comme vous le savez, il y a presque deux ans, depuis que le procès des événements du 28 septembre a eu lieu. Donc, il a eu lieu, il y a eu des condamnations. Mais comme vous le savez, la plupart de ces victimes-là sont des personnes qui étaient déjà très pauvres, il y en a qui ont été tuées, il y en a qui ont été blessées, il y en a qui ont perdu tous leurs biens à travers ces événements. Donc, les laisser comme ça, sans qu’il y ait réparation, c’est-à-dire qu’on leur donne une partie pour pouvoir les soulager, une partie de leurs biens, pour qu’ils puissent être soulagés, ce serait vraiment leur faire du tort. Ils ont subi de graves violations des droits de l’homme. Donc, ils ont droit à une réparation. Mais cette réparation ne peut pas se faire sans qu’il y ait un acte, c’est-à-dire une loi qui décrit les modalités, les principes et autres pour ces réparations. C’est ce qui nous a réunis ici aujourd’hui, nous sommes en train de faire la conclusion de l’élaboration de cette loi de réparation pour les victimes, depuis l’indépendance jusqu’à nos jours », a-t-il expliqué.

De son côté, Cheikh Alioune, membre de la commission technique en charge du suivi des recommandations des assises nationales, est revenu sur le lien direct entre cet atelier et les recommandations formulées lors desdites assises.

Cheick Alioune, membre de la commission technique en charge du suivi des recommandations des assises nationales

« Cet atelier, qui traite des questions de réparation, notamment dans son volet réparation administrative, a un lien étroit avec les recommandations des assises nationales. Parce que tout simplement, les assises nationales concourent à construire les bases d’une réconciliation et d’une cohésion sociale en République de Guinée. Alors, il est indispensable de passer par des réparations, parce qu’on est tous conscients que l’histoire de notre pays est quand même marquée par des faits historiques qui ne sont pas forcément reluisants par endroits. Alors, il y a eu des violations des droits humains, il y a eu assez de victimes. Alors, pour parvenir à une réconciliation nationale et à une cohésion sociale renforcée, il faut absolument procéder à des réparations. Cet atelier nous réunit autour d’un projet de loi qui traite de la question de la réparation administrative. Il y a des recommandations qui ont été mises en œuvre, notamment la plus célèbre peut-être, c’est la tenue du procès des événements du 28 septembre, qui était une des recommandations des assises nationales. Il y en a d’autres, plusieurs qui ont été mises en œuvre. D’ailleurs, très récemment, on a engagé un processus d’évaluation des niveaux de mise en œuvre de chacune des recommandations. Donc, dans les prochains jours, il y aura une communication sur le niveau exact de la mise en œuvre de toutes les recommandations des assises nationales. À l’issue de cet atelier, nous espérons que le projet de loi qui sortira de là, qui sera examiné par les experts réunis, pourra passer, être voté et promulgué, afin que des victimes qui ont très longtemps attendu des réparations puissent enfin en bénéficier », a-t-il laissé entendre.

Souleymane Sissoko, Directeur national de la réconciliation et de la solidarité au Ministère de la Justice et des Droits de l’Homme, a souligné l’importance de la justice transitionnelle dans ce processus.

Souleymane Sissoko, directeur national de la réconciliation et de la solidarité au ministère de la Justice et des Droits de l’Homme

« Vous savez, quand on parle de réparation, on parle de la justice transitionnelle. La justice transitionnelle comprend quatre piliers. Il y a le droit à la vérité, le droit à la justice, le droit à la réparation et les garanties de non-répétition ou les réformes institutionnelles. Aujourd’hui, nous sommes avec le troisième pilier, qui est le droit à la réparation. Depuis l’indépendance de notre pays jusqu’à maintenant, il y a eu beaucoup de cas de violations des droits de l’homme qui n’ont presque pas été pris en compte par les régimes précédents. Après, le Général Mamadi Doumbouya, avec sa volonté politique, a demandé de faire les assises nationales pour demander aux Guinéens ce qu’il faut faire pour que la cohésion sociale et la réconciliation soient renforcées dans notre pays. À l’issue des consultations, il y a eu des recommandations. Une des recommandations parle de la réparation. Donc, nous, au ministère de la Justice et des Droits de l’Homme, avons travaillé sur un avant-projet de réparation et son décret d’application. Nous sommes là aujourd’hui pour échanger avec les victimes, avec les représentants de certains départements ministériels et les organisations de la société civile, pour une meilleure compréhension de cette loi. Il faut mettre les victimes au centre de tout ce que nous faisons. Nous avons fait des consultations avec les victimes et avons travaillé ensemble dans l’élaboration de la loi et son décret d’application. Aujourd’hui, nous avons élargi la consultation ».

Asmaou Diallo, présidente de l’Association des Victimes, Parents et Amis du massacre du 28 septembre 2009 (AVIPA), salue l’organisation de cet atelier et espère que cela aboutira à la réparation des victimes.

Asmaou Diallo, présidente de l’AVIPA

« C’est avec beaucoup d’émotion que je prends la parole aujourd’hui pour cet atelier qui aborde un sujet essentiel : la réparation des victimes. Cet atelier vise à poser les bases d’un cadre légal qui permettra à ces réparations de devenir une réalité. Nous savons tous que les victimes de violences et d’injustice ont vécu des épreuves difficiles. Elles ont besoin non seulement de reconnaissance, mais aussi d’un soutien concret pour se reconstruire. Mettre en place un cadre pour la réparation administrative, c’est répondre à ce besoin. C’est aussi un pas important pour la justice et la réconciliation dans notre pays. Cet atelier est un moment clé pour unir nos efforts. Il est important que les associations de victimes soient au centre des discussions. Elles comprennent mieux que quiconque les attentes et les besoins des personnes touchées. En travaillant ensemble, nous pourrons proposer des solutions qui répondent à ces attentes. Permettez-moi de saluer l’engagement du Ministère de la Justice et des Droits de l’Homme pour son implication et son leadership dans la réalisation de cette réflexion stratégique. Je tiens également à remercier nos partenaires, tels que l’Organisation Guinéenne de Défense des Droits de l’Homme et du Citoyen (OGDH) et le Global Survivors Fund (GSF), pour leur soutien indéfectible dans cette mission.

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