Guinée : Quelles conséquences sur un éventuel glissement du calendrier électoral ?
Suite à l’annonce du Premier ministre Bah Oury, d’un éventuel glissement du calendrier électoral devant permettre le retour à l’ordre constitutionnel, des voix se lèvent pour protester contre les manœuvres du CNRD en vue de confisquer le pouvoir.
Alors que la fin de la transition est annoncée pour le 31 décembre 2024, à date, il n’y a aucune avancée pour permettre le retour à l’ordre constitutionnel à la date indiquée.
Une situation qui amène certains acteurs politiques et de la Société civile à mettre en garde la junte militaire sur le risque lié à un glissement du calendrier électoral.
Réunis au sein des Forces vives de Guinée, les principales formations politiques (UFDG, RPG-a.e.c et UFR) et la Société Civile (FNDC et Forces sociales), ont annoncé récemment qu’elles ne reconnaitront pas le CNRD (la junte militaire) après le 31 décembre 2024.
« Après plus de deux ans de Transition, la Guinée ne dispose toujours pas de projet de Constitution, ni de Code Électoral, ni d’Organe de Gestion des Élections, ni de Fichier, ni d’Opérateur technique. Au lieu de s’atteler à réunir les conditions nécessaires à l’organisation des élections, le CNRD renforce la restriction des libertés publiques et multiplie le harcèlement à l’encontre des leaders socio-politiques et des journalistes », regrettent les Forces vives de Guinée.
Avant de mettre en garde le CNRD contre un éventuel glissement du calendrier : « Les Forces Vives de Guinée réitèrent leur appel pressant à la formation d’une large coalition patriotique pour exiger la rectification de la Transition par la mise en œuvre des mesures ci-dessus indiquées, la restauration des libertés publiques et le retour à l’ordre constitutionnel avant le 31 décembre 2024. Passé ce délai, les Forces Vives de Guinée ne reconnaîtront plus le CNRD », lit-on dans une déclaration conjointe des principaux acteurs politiques et de la Société civile.
Interrogé sur cette question qui préoccupe plus d’un guinéen, le Pr Salifou Sylla, Constitutionnaliste et ancien ministre de la Justice, qui avait pris part à l’élaboration de la Loi Fondamentale de 1990 et la rédaction de la Constitution de 2010, estime qu’on n’avait pas vraiment besoin d’élaborer une nouvelle Constitution, qu’on n’a encore pas vue, et qu’il fallait améliorer celle de 2010.
« Ils (membres CNRD ndlr) ont dit qu’il y aura une nouvelle Constitution qui nous ‘’ressemble et qui nous rassemble et qu’elle va faire une refondation de l’Etat’’. Je ne sais pas ce que ça veut dire. Je crois qu’ils sont en train d’élaborer le projet de la Constitution qui n’arrive toujours pas à sortir. Mais ce que je comprends, il y a certains qui sont dans le CNT qui élaborent la constitution mais même les autres membres du CNT ne sont pas au courant.
Celle de 2010 on pouvait l’améliorer et l’appliquer. Comme ça, on ne se serait pas lancé dans l’élaboration d’une nouvelle constitution. Normalement, on doit présenter le texte à la population pour en discuter avant de prévoir un référendum au cours de cette année. Mais on parle de référendum alors qu’on ne connait pas le texte d’abord ? Ils nous disent que c’est une constitution qui nous rassemble, qui nous ressemble et qu’on ne va pas réviser facilement. Mais ça dépend. Toute constitution est élaborée en fonction des facteurs du moment, économiques, sociaux et tout. Mais dans l’histoire, les facteurs sont appelés à évoluer et si les facteurs évoluent, on est obligé de réviser pour adapter à la situation. Ils nous disent que ce sera une constitution qui résistera au temps mais il faudrait qu’on nous donne le contenu de cette ‘’constitution qui résistera au temps’’. Après, nous verrons si elle résiste au temps ou pas, nous verrons quelle sera la répartition des pouvoirs et tant d’autres. Nous attendons cette constitution pour voir si vraiment elle nous rassemble, ou nous ressemble ou bien si elle va résister au temps. » a récemment déclaré le Constitutionnaliste dans une interview accordée à nos confrères d’Africaguinee.
Selon un observateur de la scène politique guinéenne, « le Président de la transition, le Général Mamadi Doumbouya, qui a accédé au pouvoir par un coup d’Etat et qui ne disposant d’aucune légitimité, court un gros risque en voulant s’accrocher au pouvoir contre la volonté populaire. »
Pendant que tous les regards sont tournés vers le 31 décembre 2024, date butoir de la fin de la transition, le Général Mamadi Doumbouya a procédé lundi soir à un vaste remaniement au sein de l’armée, en nommant plusieurs officiers dans les différentes régions militaires du pays.
Qui va arrêter le CNRD ?
Wait and see (attendons de voir)
Abdoul Wahab Barry