Ils ont franchi la ligne rouge
Le CNRD et son gouvernement de transition viennent de franchir un cap dangereux, une ligne rouge que la mémoire collective du Fouta ne saurait tolérer.
Dans une mise en scène méthodique, ils ont fait circuler un document encore à l’état de projet — la future Constitution —, pour le remettre, sous les caméras, aux figures les plus sacrées du Fouta. Imam, érudits, sages, tous instrumentalisés dans une opération de communication qui dissimule mal ses intentions : faire croire à une adhésion populaire là où ne règne qu’une hostilité grandissante.
Ce n’était pas une consultation.
Ce n’était pas un débat.
Ce n’était pas un échange.
C’était une tentative d’annexion symbolique. Une récupération de l’image des sages du Fouta pour donner une légitimité à un texte qui ne l’a pas encore, parce qu’il n’a pas été soumis au peuple.
Faut-il rappeler que ce document n’est pas encore une Constitution ?
Faut-il rappeler qu’il s’agit d’un projet, contesté, controversé, et rejeté par une large frange de la population ?
Faut-il rappeler que ce sont des citoyens, pas des symboles, qui doivent trancher ?

En procédant ainsi, le CNRD place délibérément les sages dans une position intenable : celle de garants d’un texte que la majorité des Guinéens récusent. Il les place, malgré eux, dans un conflit frontal avec leur propre peuple.
C’est une faute politique grave.
C’est une offense au Fouta.
C’est une humiliation dissimulée sous les habits de la tradition.
Nous ne l’acceptons pas.
Au lieu d’organiser un véritable débat national, de soumettre le texte aux syndicats, aux organisations de la société civile, aux intellectuels, aux étudiants, aux groupements professionnels, le CNRD a préféré les apparats. L’image, plutôt que le dialogue. La mise en scène, plutôt que le respect.
Les Guinéens ne sont pas dupes.
Les enfants du Fouta encore moins.
Nous appelons toutes les filles et tous les fils de cette région, où qu’ils se trouvent dans le monde, à mesurer la gravité de l’acte. À prendre la mesure du mépris qu’il incarne. À sortir du silence. À réagir avec fermeté.
Notre dignité n’est pas à vendre.
Nos symboles ne sont pas des accessoires politiques.
Notre mémoire n’est pas un terrain de communication.
Aujourd’hui, c’est le Fouta qu’ils tentent d’utiliser.
Demain, ce sera une autre région, un autre peuple, une autre mémoire.
C’est maintenant qu’il faut dire non.
Un non franc, net, sans détour.
Un non qui fera date.
Alpha Issagha Diallo
Écrivain, fils du Fouta, témoin d’un peuple qu’on ne manipule pas.
Je signe au nom de la dignité, de la mémoire et de l’avenir.
