Jean-Louis Billon, candidat à la présidentielle ivoirienne : « Il faut oser le changement »
Candidat à l’élection présidentielle du 25 octobre en Côte d’Ivoire, Jean Louis Billon veut incarner le changement de génération politique.
Homme d’affaires puis ministre du Commerce entre 2012 et 2017 sous la présidence d’Alassane Ouattara, Billon se présente sous la bannière du Congrès Démocratique (CODE).
Né le 8 décembre 1964 à Bouaké, Jean-Louis Billon est l’héritier d’une grande famille d’entrepreneurs ivoiriens.
Fils de Pierre Billon, fondateur du groupe agro-industriel SIFCA, il en a été directeur général avant de se lancer en politique.
A 60 ans, l’ex-cadre du PDCI-RDA qui a pris ses distances avec ce parti revendique une nouvelle offre politique « libérée des logiques partisanes » et tournée vers le pragmatisme.
Dans un entretien accordé à BBC Afrique, il détaille sa vision d’une Côte d’Ivoire « économiquement forte, socialement juste et écologiquement durable ».
BBC News Afrique : Quels sont les grands points que vous souhaitez défendre pendant cette campagne ?
Jean-Louis Billon : Je veux faire de la Côte d’Ivoire un pays économiquement fort. On ne peut pas avoir les moyens de sa politique si l’on n’est pas d’abord fort économiquement. C’est pourquoi nous devons atteindre la souveraineté économique, et cela passe par un secteur privé beaucoup plus solide. La croissance du pays doit résulter d’un secteur privé dynamique — depuis la plus petite entreprise artisanale jusqu’à la plus grande — afin que les Ivoiriens aient plus d’emplois, plus de revenus et plus de pouvoir d’achat. Depuis 2010, l’économie ivoirienne a réellement progressé.
BBC News Afrique : Que pensez-vous justement du bilan du président Ouattara ?
Jean-Louis Billon : Le bilan du président Ouattara est acceptable, dans la mesure où il a permis de rattraper le retard en matière d’infrastructures accumulé pendant de longues années de crise. En revanche, le bilan humain et social est moins reluisant. Aujourd’hui, la croissance ivoirienne repose essentiellement sur l’investissement public, alors qu’il faut que le secteur privé en soit le véritable moteur.
BBC News Afrique : Quels sont les autres piliers de votre programme ?
Jean-Louis Billon : Après l’économie, il y a le capital humain, mais aussi le développement durable. Nous avons décimé notre forêt : il faut la reconstituer. Nous devons repenser l’urbanisme de nos villes, protéger nos ressources pour les générations futures et instaurer une gouvernance exemplaire : gestion rigoureuse des affaires publiques, lutte contre la corruption, réduction du train de vie de l’État et assainissement des finances publiques. C’est tout cela qui nous garantira la paix, l’unité et la sécurité intérieure, et qui favorisera la cohésion sociale.
La cohésion sociale, c’est un thème récurrent dans les discours politiques. Concrètement, que signifie-t-elle pour vous ?
Jean-Louis Billon : Il faut retrouver l’union qui a toujours fait la force de la Côte d’Ivoire. Cela passe par le dialogue, par des assises nationales pour la réconciliation, mais aussi par une réforme des institutions sociales que sont la justice et la police. Les Ivoiriens doivent pouvoir faire confiance à leur système.

BBC News Afrique : Au niveau régional, la Côte d’Ivoire a des voisins confrontés à l’instabilité et aux attaques de groupes armés, et qui ne sont pas toujours amicaux. Quelle serait votre politique à leur égard ?
Jean-Louis Billon : Je me rendrai dans ces pays. Je respecte leurs choix et je demande qu’ils respectent les nôtres. Nous devons coopérer pour lutter contre le terrorisme, un fléau qui gangrène aujourd’hui toute la sous-région. Il faut rester pragmatique : la Côte d’Ivoire n’est pas, contrairement à ce que certains pensent, une base arrière contre ces pays. Nous avons tout intérêt à avoir autour de nous des États stables et prospères plutôt que des pays plongés dans la misère ou l’instabilité. Notre économie est désormais tournée vers la sous-région.
BBC News Afrique : L’opposition part aux élections en rangs dispersés. Une stratégie commune est-elle envisageable ?
Jean-Louis Billon : On ne peut pas reprocher à l’opposition de partir en rangs dispersés. L’essentiel, c’est qu’un candidat de l’opposition accède au second tour. Je pense que c’est possible, pour moi c’est jouable. Et à ce moment-là, je souhaite que les autres forces de l’opposition appellent à voter pour moi, afin d’assurer une victoire qui sera celle de l’opposition tout entière au second tour. D’ailleurs, j’en appelle solennellement à tous mes frères du PDCI, mon parti d’origine, pour qu’ils me rejoignent dès à présent. C’est vrai que mon frère Tidiane (Thiam) et moi avons eu nos différences, mais la grandeur de la Côte d’Ivoire est bien plus importante que nos querelles personnelles.
BBC News Afrique : Si vous aviez un seul message à adresser aux électeurs, quel serait-il ?
Jean-Louis Billon : Je sais que la grande majorité des Ivoiriens veulent le changement, veulent une nouvelle génération. Alors osons ce changement. C’est par un vote massif que nous pourrons mettre un terme au régime actuel et ouvrir une nouvelle ère pour la Côte d’Ivoire, avec une nouvelle vision et une nouvelle génération de dirigeants. Il faut oser le changement.
