L’AMG dénonce « l’immixtion du ministre de la Justice dans la gestion des Affaires judiciaires ».
Entre le ministre de la Justice et des Droits de l’Homme, Alphonse Charles Wright et l’Association des Magistrats de Guinée (AMG), dont il est membre, les ponts semblent définitivement coupés. Le Ministre est pratiquement parvenu à faire l’unanimité contre lui. Et nombre d’observateurs estiment que de nombreux problèmes sociopolitiques du pays sont « le fait de ce Monsieur très protégé par le Colonel Doumbouya ».
COMMUNIQUÉ
Le Conseil d’ Administration de I’ Association des Magistrats de Guinée (AMG) a été saisi par des magistrats du tribunal de première instance de Labé relativement à une convocation verbale impérative dont ils font l’objet suite à une décision dûment rendue.
Répondant à cette convocation, énorme fut le choc, lorsque le président audiencier a croisé la personne que lui-même venait juste de placer sous mandat de dépôt suite à une condamnation de dix (10) mois d’emprisonnement dont deux (2) fermes, dans l’ascenseur en direction du cabinet du Garde des sceaux, ministre de la justice et des droits de I’Homme.
Nonobstant le refus du président audiencier d’être confronté à cette condamnée au motif que cela n’est nullement prévu par les lois de la République, il ne cesse de subir un harcèlement aux fins d’être entendu et ce, sans aucune formalité légale.
Il en va de même pour le magistrat du parquet, également convoqué par sa hiérarchie au sujet de la même procédure.
L’AMG dénonce fermement ces agissements manifestement illégaux qui résultent sans nul doute de l’immixtion du ministre de la Justice dans la gestion des Affaires judiciaires.
En tant que gardienne des intérêts moraux et matériels des magistrats, elle considère que cette immixtion constitue ne atteinte grave à l’indépendance du juge et compromet sérieusement le bon fonctionnement du Système judiciaire de la République de Guinée
Elle rappelle que l’indépendance du Pouvoir judiciaire est un principe fondamental de notre système démocratique et de l’État de droit.
A cet égard, les magistrats doivent pouvoir exercer leurs fonctions respectives en toute impartialité, sans ingérence politique, afin d’assurer pour nos citoyens une justice équitable et indépendante.
Fort malheureusement, c’est avec une profonde inquiétude que I’AMG constate de façon récurrente et désobligeante l’immixtion de monsieur le ministre de la Justice dans la gestion des Affaires judiciaires, en donnant des instructions ou en exprimant publiquement ses opinions en lieu et place des procureurs sur des dossiers pendants devant les cours et tribunaux, en violation flagrante du code de procédure pénale, notamment en son article 8, alinéa 3 qui dispose : « Toutefois, afin d’éviter la propagation d’informations parcellaires ou inexactes ou pour mettre fin à un trouble à l’ordre public, le procureur de la République peut, d’office ou à la demande de la juridiction d’instruction ou des parties, rendre publics des éléments objectifs tirés de la procédure ne comportant aucune appréciation sur le bien-fondé des charges retenues contre les personnes mises en cause».
Ce comportement regrettable porte foncièrement atteinte aussi bien au principe de la séparation des pouvoirs, essence de la démocratie et l’Etat de droit, mais aussi à la crédibilité de la gouvernance actuelle car faisant chuter l’indice d’intégrité et indépendance de notre justice notre Justice.
Soucieuse de la réussite de la Transition en cours, l’AMG exhorte le garde des sceaux, ministre de la justice et des droits de I’Homme à respecter les textes qui gouvernent la profession de magistrat et ceux qui encadrent le fonctionnement des cours et tribunaux
On ne peut pas espérer à une « refondation de I’Etat » en empêchant les magistrats par quelque manière que ce soit, d’ exercer librement leur profession.
L’AMG trouve utile de rappeler à nouveau, qu’au sens de l’article 16, alinéa 3 de la Loi 054 portant statut des magistrats : « Aucun compte ne peut être demandé aux juges au sujet des décisions qu’ils rendent ou auxquelles ils participent, ni aucune instruction ne peut leur être donnée pour le règlement des affaires qui leur sont soumises».
L’article 17 de la loi susmentionnée ne dispose-t-il pas : « les magistrats doivent toujours préserver la dignité et l’honneur de leur charge. L’Etat veille à ce que les magistrats puissent s’acquitter de leurs fonctions professionnelles en toute liberté, sans ingérence, sans faire l’objet d’intimidation, de harcèlement, d’aucune sorte et sans devoir assumer, de quelque façon que ce soit, une responsabilité civile, pénale ou autre, sauf les cas de fautes professionnelles ou disciplinaires.».
Préoccupée par la promotion, la protection et la sauvegarde de l’indépendance du Pouvoir judiciaire en République de Guinée, I’AMG reste toujours disposée à accompagner en toute légalité les Autorités de la transition afin que la séparation des pouvoirs soit une réalité. C’est pourquoi, à cette occasion, elle les invite respectueusement encore une une fois, fois, à à demeurer attentives au respect des lois de la République.
Par la même occasion, I’AMG leur recommande révérencieusement à prendre les mesures nécessaires pour garantir l’égalité entre les Guinéens, afin de faire de notre Justice, la véritable boussole qui guidera les actions des uns et des autres.
L’AMG réitère officiellement sa solidarité et son soutien indéfectible aux magistrats concernés et les invite à rester sereins et résilients face à toute démarche non conforme à la loi.
En définitive, I’AMG invite tous les magistrats à rester unis, solidaires, vigilants et à défendre l’intégrité de la justice, afin d’assurer une Société juste et équitable pour tous les citoyens, en cette période sensible et cruciale de l’histoire de notre Guinée.