LE CNRD N’EST-IL PAS LOIN D’ORGANISER DES ÉLECTIONS ? (PAR IBRAHIMA CHERIF)
Il est très difficile de dire dès maintenant que l’histoire se répète dans la vie politique guinéenne ; nos observations et nos analyses doivent aller plus loin avant de se prononcer clairement sur un éventuel échec de cette transition en cours avec le Comité National du Rassemblement pour le Développement (CNRD).
De toute évidence, il faut mentionner que toutes les transitions militaires en Guinée ont été un échec total malgré une manifestation de joie par la population assoiffée d’un changement meilleur. Cet espoir au désespoir a toujours été le schéma dont les guinéens ont tracé dans leur histoire de transition militaire. Et, à chaque fois qu’il y a eu un coup d’État en Guinée, le peuple s’est senti libéré d’un sentiment de vivre mieux, parce que les promesses tenues par la junte, rassurent et deviennent un plat très délicieux.
Ainsi, après le fameux coup d’État du 05 Septembre 2021, renversant le régime de monsieur Alpha Condé par le groupement des forces spéciales à sa tête Mamady Doumbouya, le même espoir a été ressenti au sein de la population guinéenne. Les premières déclarations de la junte militaire étaient pratiquement le résumé de l’aspiration des pauvres citoyens guinéens notamment la justice comme boussole, la lutte contre la corruption, les arrestations arbitraires, la gabegie financière, la lutte contre la division des guinéens, etc… Ces mots et phrases suffisaient, à elles seules, pour donner une garantie à la démarche menée.
Au fur et à mesure que les jours passaient, des réformes inimaginables étaient visibles comme par exemple la mise à la retraite d’un nombre record des fonctionnaires civils et militaires, le gel des comptes ou des avoirs, la récupération des biens de l’Etat, la mise en place d’un gouvernement civil et jeune et tant d’autres non cités ici.
Mais, plus de 4 mois de cela, l’allure d’une transition digne de nom est loin d’être au rendez-vous. Le CNRD a du mal à nous fixer une durée de la transition qui, étant un élément clé de toute transition politique. L’argumentation avancée d’attendre l’installation du Conseil National de la Transition (CNT) comme l’organe législatif (a du mal à être installé), un piège dont les hommes politiques n’ont pas vu venir. Il est très important de savoir que certains chantiers de réformes ne sont pas le travail d’un gouvernement de transition.
Un gouvernement de transition est supposé mettre en place tous les mécanismes nécessaires pour organiser les élections transparentes et crédibles. Son objectif ne devrait pas d’éliminer certains acteurs pour promouvoir d’autres contre la volonté populaire. Ce gouvernement de transition devrait se focaliser sur l’essentiel c’est-à-dire mettre en place toutes les conditions démocratiques permettant de passer le pouvoir au civil ou à l’autorité légale et légitime.
Par conséquent, le CNRD dans sa démarche de tous les jours, est loin d’atteindre cet objectif, ils goûtent à toutes les sauces de la Guinée. A ce stade, certains chantiers de reformes que le CNRD se mêle sont des comportements populistes pour draguer un peuple manipulable et le détourner de ses intentions sur les élections puis sur le chronogramme de la transition. Ils nous parlent tantôt des audits et de la refondation. Alors que la question principale est comment mener cette transition vers des élections crédibles et transparentes ne font aucun cas le sujet du jour. Si hier un va tomber, aujourd’hui c’est tout le monde qui pourrait tomber.
Donc, s’il n’y a pas une force légale pour stopper cet élan par ce gouvernement de transition, notre pays risque de se plonger encore dans une nouvelle crise douloureuse. Un gouvernement de transition doit connaitre son objectif réel, sinon il serait difficile de se débarrasser du miel du pouvoir. Le scénario malien n’est pas à écarter en Guinée par rapport à la situation actuelle.
Dans la plupart des cas en Afrique, les pouvoirs militaires n’ont aucune orientation politique et de développement, ils cherchent toujours à se légitimer à travers des actes populistes afin de prendre du goût au pouvoir. Une douce musique qui attire ses victimes, il faut qu’on oriente/guide ce CNRD avant que ça ne soit trop tard. Le rythme de la Guinée dans ce contexte actuel, la force est de reconnaitre que cette transition militaire est loin d’organiser les élections au moment opportun. Tous les acteurs sociopolitiques ont peur d’affronter l’abeille, chacun a perdu sa langue. Notre politique est une simple chaîne alimentaire; la même réalité et le même resultat.
IBRAHIMA CHERIF
Doctorant/ Sciences Politiques et Administration Publique/Turquie
Email: ibrahimacherif88gmail.com