On vote ce dimanche 23 novembre en Guinée-Bissau
Élu pour la première fois en 2019, il brigue un second mandat alors qu’il s’était initialement engagé à n’en exercer qu’un seul.
En 2023, il a dissous le parlement contrôlé par l’opposition après des affrontements armés qu’il a qualifiés de tentative de coup d’État. Les détracteurs ont vu dans cette décision une tentative de prolonger son mandat.
« Bien que le mandat officiel d’Embalo ait pris fin en février 2025, il est resté en fonction et a passé les mois suivants à écarter systématiquement l’opposition« , a déclaré le journaliste et professeur guinéen Bacar Camara dans une interview accordée à la DW.
En conséquence, sur les 14 partis en lice pour 102 sièges parlementaires, seule la plateforme pro-gouvernementale « Nô Kumpu Guiné » (Ensemble pour la Guinée-Bissau ) a une chance réaliste de remporter la majorité.
Pour la première fois dans l’histoire du pays, le PAIGC, qui a conduit la Guinée-Bissau à l’indépendance du Portugal en 1974, ne figurera pas sur les bulletins de vote.
La coalition PAI-Terra Ranka (En avant avec notre patrie) dirigée par le PAIGC et menée par le principal rival d’Embalo, Domingos Simões Pereira, a été disqualifiée par la Cour suprême en octobre. Officiellement, la raison invoquée était la soumission tardive des documents électoraux, mais de nombreux observateurs y voient une motivation politique.

Le pouvoir judiciaire accusé d’être instrumentalisé
Le professeur Camara critique le régime pour avoir utilisé le pouvoir judiciaire afin d’éliminer ses opposants politiques.
« Les deux principales coalitions d’opposition ont simplement été disqualifiées pour des raisons juridiques qui ne reposent sur aucune base crédible », a-t-il déclaré. Il a décrit cette décision comme un « effet domino » observé dans d’autres pays africains, une stratégie visant à affaiblir systématiquement l’opposition et à consolider le pouvoir.
Outre « Nô Kumpu Guiné », 13 autres partis sont en lice, mais ils manquent de ressources et de visibilité.
M. Camara note qu’Embalo utilise largement les ressources de l’État : « À Bissau, presque toutes les affiches de campagne sont en sa faveur. Il est pratiquement le seul candidat à bénéficier d’un soutien financier. »
La seule alternative significative est le candidat indépendant Fernando Dias, soutenu par une base électorale stable qui comprend des éléments du PAIGC. Les autres candidats, tels que José Mário Vaz et Baciro Djá, restent largement marginaux.
Surveillance internationale limitée
Guery Gomes Lopes, porte-parole de la Ligue guinéenne des droits de l’homme, a critiqué le manque d’engagement des organisations internationales. Ni la Cédéao, ni l’Union africaine, ni l’UE, ni les États-Unis, n’ont manifesté un intérêt significatif.
L’invitation d’observateurs internationaux n’est pas claire, tandis que la législation nationale n’autorise pas les observateurs locaux. Certains groupes de la société civile prévoient de superviser les élections, mais leurs capacités sont limitées.

La liberté de la presse mise à rude épreuve
La couverture médiatique indépendante de ces élections est également restreinte. Les chaînes publiques portugaises RTP África et RDP África, ainsi que l’agence de presse LUSA, ont été expulsées du pays en août. Camara constate un déséquilibre flagrant : alors que le temps d’antenne est réglementé par la loi, la couverture médiatique est fortement biaisée en faveur du gouvernement, laissant les voix de l’opposition marginalisées.
Perspectives : Embalo et « Nô Kumpu Guiné » devraient largement remporter les élections. La principale incertitude réside dans la nécessité ou non d’un second tour, auquel cas le candidat arrivé en deuxième position, probablement Fernando Dias, aurait peu de chances de l’emporter. Si un candidat de l’opposition venait à gagner, les élections législatives pourraient être invalidées, ce qui pourrait entraîner la réintégration du parlement dissous en 2023. Le professeur Camara conclut : « Quel que soit le résultat, le chaos politique en Guinée-Bissau devrait se poursuivre. »
Cette ancienne colonie portugaise est devenue indépendante en 1974 après une longue guerre de libération, menée par le Parti africain pour l’Indépendance de la Guinée-Bissau et du Cap-Vert (PAIGC) d’Amilcar Cabral, assassiné en 1973.
Depuis, le pays a connu quatre putschs (le dernier en 2012), plus d’une quinzaine de tentatives de coup d’Etat et une valse des gouvernements.
Par Antonio Cascais | Georges Ibrahim Tounkara
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