Qui est le conseiller politique qui se cache derrière le Général Mamadi Doumbouya ?
Depuis l’arrivée du CNRD au pouvoir le 5 septembre 2021, la Guinée vit une transition où les décisions politiques, économiques et institutionnelles se succèdent avec une cohérence apparente, mais une opacité persistante. Une question revient de plus en plus dans les débats : ‘’Qui conseille réellement le Général Mamadi Doumbouya ?’’
Non pas pour identifier un nom, mais pour comprendre la logique, l’architecture et l’influence derrière quatre années de décisions décisives, jusqu’à son choix de se porter candidat à l’élection présidentielle du 28 décembre 2025.
Une transition gouvernée par des heures graves et des choix déterminants
L’arrivée du CNRD a été justifiée par la volonté de refonder l’État. La promesse était forte : restaurer la confiance, réécrire les règles, reconstruire les institutions. Mais derrière ces engagements se dessine une série de décisions qui interrogent : suspension de la Constitution de 2020, dissolution des institutions et nomination des organes de transition, mise en avant d’un calendrier politique plusieurs fois reconfiguré, suspension de trois grands partis d’opposition en 2025, adoption d’une nouvelle Constitution ouvrant la voie à la candidature de transitionnaires, annonce et organisation de la présidentielle du 28 décembre 2025
À chaque étape, une même question plane : ‘’Quelle vision, quelle stratégie, quelle consultation ont précédé ces choix ?’’
Une gouvernance mêlant souveraineté, contrôle et stratégie économique
- Le discours de souveraineté comme ligne de force
Depuis 2021, l’argumentaire public du pouvoir repose sur trois piliers : la stabilité, la souveraineté nationale et la refondation de l’État
Ces éléments structurent un récit politique très maîtrisé, rarement improvisé. Ils traduisent une stratégie de communication pensée, calibrée, presque doctrinale. Ce type de cohérence laisse supposer l’influence d’un conseiller idéologique, quelqu’un qui maîtrise l’ingénierie du récit national.
2. L’économie comme levier de légitimité
Le lancement du programme Simandou 2040 et les alliances avec plusieurs puissances économiques traduisent une stratégie assumée : s’ancrer dans les grands projets miniers pour sécuriser la place du régime et préparer un second cycle politique. Mais ce type de négociation nécessite une expertise technique, juridique et géoéconomique. Ici encore, un ‘’cerveau économique’’ semble orienter les arbitrages.
Le conseiller invisible ou la stratégie des influences multiples ?
Il serait simpliste d’attribuer toutes les décisions à un seul conseiller. La vérité guinéenne est souvent plus complexe :
- Un cercle réduit, mais diversifié
La transition semble s’appuyer sur un noyau invisible composé de conseillers militaires, d’experts juridiques ayant travaillé sur la nouvelle Constitution, d’acteurs économiques liés aux grands projets miniers, de partenaires internationaux poursuivant leurs propres agendas.
2. Une influence extérieure palpable
Certains observateurs soulignent que la structuration économique de la transition, notamment autour du projet Simandou, porte l’empreinte d’intérêts stratégiques étrangers. Dans ce cas, le “conseiller” peut être une dynamique géoéconomique, plus qu’un individu.
Une décision qui change la nature de la question
Le choix du Général Doumbouya d’être candidat marque une rupture majeure. Ce n’est plus seulement la transition qu’il faut analyser, mais la conversion d’un pouvoir militaire en pouvoir politique.
Ce passage exige une stratégie électorale, un repositionnement diplomatique, un discours de légitimation, une redéfinition de l’équilibre intérieur. Ce type de repositionnement ne se fait jamais sans conseillers. Mais lesquels ? Politiques ? Techniques ? Internationaux ? Ou un mélange de tous ?
Pour une gouvernance lisible : trois recommandations
Que l’on soutienne ou non la candidature du Général, un point reste central : La Guinée doit savoir qui influence les décisions majeures, sans cela, aucune transparence, aucune confiance, aucune stabilité durable n’est possible.
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- Rendre publics les cadres de décision : commissions, conseillers, experts : le pays doit connaître les profils, compétences et missions.
- Clarifier les engagements économiques : les accords miniers et stratégiques doivent être publiés, accessibles et contrôlés par des institutions indépendantes.
- Garantir un espace politique pluraliste : un pouvoir ne peut être solide que s’il accepte l’existence d’autres voix.
Un pays à la croisée des chemins
La transition guinéenne est l’une des plus stratégiques de l’Afrique de l’Ouest contemporaine. Mais elle porte une ambiguïté permanente : Qui pense réellement pour le pouvoir ?
Cette question n’est ni polémique, ni partisane : elle est démocratique. Un pays peut accepter d’être dirigé par un homme, mais il ne peut accepter d’être dirigé par une influence invisible.
Le débat doit aujourd’hui commencer
Par Abdourahamane CONDE

Politologue
