Recul de la France, revers de Macron avec les putschistes, un Président touché, mais pas coulé…
Après son accession fulgurante à la magistrature suprême de son pays, Emmanuel Macron a voulu, dès les premières heures de sa présidence dite de renouveau et d’innovations, se démarquer de ses prédécesseurs, en s’engageant, à corps perdu dans la bataille, d’une politique de rupture dans les relations de la France avec l’Afrique.
Ainsi, sans se référer aux péripéties édifiantes d’une l’histoire tumultueuse, ni s’inquiéter des conséquences possibles de ses promesses messianiques, encore moins partager l’expérience de ses illustres aînés, il s’est déclaré, tout de go, favorable à remettre tout à plat, afin d’explorer de nouvelles voies de coopération, en phase avec la nouvelle époque, et les exigences de générations montantes.
L’offensive de charme engagée par le jeune Président, qui avait l’excuse de l’enthousiasme du nouvel élu, tranche avec la Réal politique, nourrit et entretient l’illusion qu’il sera possible dans un monde de rapports de force et de jeux de domination, de traiter d’égal à égal. L’ option instinctive et intuitive, du Président révolutionnaire se retourne contre lui, fait du tort à son pays. Lui qui espérait redorer le blason de la France, étendre son influence à d’autres États, tout en renforçant son implantation partout où elle a des liens très anciens déjà, a fini par se rendre compte qu’il a prêté le flanc à la flagellation de la politique française en Afrique, a ouvert une énorme brèche pour une nouvelle ère de ‘´ French bashing’’
C’est toujours le même problème de fausses solutions à des difficultés épineuses, lorsque la société est pensée par les rêveurs impénitents, la conduite des affaires publiques est empreinte de démagogie et ploie sous les montées populistes. Ainsi, des chercheurs, intellectuels, et d’autres libres penseurs, activistes aussi, ont fait croire que l’une des clés pour la reconquête de l’Afrique, c’est de s’adresser maintenant et directement à la société civile, à la jeunesse, qui seraient des interlocuteurs plus légitimes que les Chefs d’Etat, élus par leurs peuples mais qui ne seraient plus en odeur de sainteté auprès d’eux, parce que leurs mandats seraient litigieux et qu’ils seraient tous coupables de mauvaise gouvernance.
C’est dans ce cadre qu’il y a eu le sommet France-Afrique, à Montpellier, où pour la première fois de l’histoire de ce rituel de rencontre entre le Président de la République Française avec ses pairs, il n’y a pas eu l’ombre d’un seul de ceux-ci. Macron s’est entouré de personnes qu’on a dit représenter leurs pays, sans en avoir la qualité ni le mandat, pour débattre de ce que devrait être l’avenir du continent, le destin des Africains.
D’ailleurs, le ton suffisant et sarcastique des invités personnels et privés du Président Macron qui, chacun, dans son pays ne représente que lui-même et ne peut parler qu’en son nom, a indiqué qu’il avait en face de lui, des interlocuteurs qui, ne connaissant rien de la doctrine d’Etat et des dessous de cartes des relations internationales, croient, benoîtement, en un monde idéal où chaque État discuterait chez l’autre avec le ‘´peuple ‘ au lieu de ses représentants, où tous les peuples seraient indépendants les uns des autres, souverains, à part entière, pourraient accéder à la plénitude, par la contestation des dirigeants légitimes et le refus de l’ordre établi.
Ce que les militaires, tentent de faire aussi et réussissent mieux que les activistes anarchistes qui disputent la légitimité aux élus authentiques, disposant d’armes qui parlent plus haut que le verbe, tranchent dans le vif.
En substituant des acteurs qui n’ont pas d’assise ni de pouvoir de décision à ses partenaires Chefs d’Etat qui, aussi longtemps qu’ils seront en place, pèseront sur le destin et la conscience de leurs opinions respectives, le Président Macron s’est isolé davantage, a rendu la France plus vulnérable que par le passé. Plaire ou complaire ? Séduire ou s’imposer ?
Les Chefs d’Etat, qu’il a mis de côté et sous-estimé, sont ceux là qui prennent des coups à toutes les occasions, pour que leurs pays continuent à coopérer avec la France, tandis que ceux auxquels il a déroulé le tapis rouge, sont issus de la société civile, du milieu des ONG et d’autres courants ultra-nationalistes et souverainistes qui agitent les opinions contre la France et sa présence en Afrique. Sacrifier des amis et alliés pour s’engager avec des idéalistes et propagandistes, potentiellement ennemis, n’est pas de bon aloi, ni d’une grande habileté politique et diplomatique.
L’autre chose qui explique qu’on ‘´ose’ plus qu’il ne faut, aujourd’hui, la France, est son attitude de prudence et de réserve, face aux putschs et aux putschistes : trop s’avancer susciterait des critiques à propos de la violation de la souveraineté des États, faire profil bas, donne lieu à d’autres interprétations, comme un silence connivent ou une complicité coupable. Cette pusillanimité d’une France qui ne veut pas s’assumer, de ses dirigeants qui ont peur d’être pris à partie, a ruiné les acquis de longues années, a permis de se moquer de la puissance française, naguère crainte, partout sur le continent.
Avant Emmanuel Macron, les Chefs d’Etat français, successifs, ne prenaient pas trop de précautions ni ne se fixaient, outre mesure, des limites, pour se faire entendre et respecter. C’est à cela qu’essaie de revenir Emmanuel Macron qui comprend, peut-être tardivement, qu’on ne peut remplacer le bâton par la carotte, qu’il faut se réserver le droit, d’utiliser alternativement, l’un ou l’autre, au gré des circonstances et selon les personnes qu’on a en face.
La fermeté face à la junte nigérienne notamment en refusant de reconnaître sa légitimité et de se soumettre à ses lubies, est la posture qu’il fallait adopter dès le début, face à toutes les juntes et à tous les putschistes. Car c’est la capitulation au Mali devant les vexations et les réprimandes d’une junte arrogante et méprisante à l’encontre de la France qui convainc tous que les Français sont une proie facile, la France est devenue le ventre mou de l’Occident.
Ce n’est pas par hasard que la junte nigérienne qui avait initialement décidé de renvoyer les ambassadeurs des États-Unis, du Nigeria, de l’Allemagne et de la France, se rétracte pour les autres, en jetant son dévolu sur le seul représentant français.
Personne ne recule ou ne plie devant le faible, tous les peuples et dirigeants du monde ainsi que chaque homme rêvent d’avoir des amis forts et des partenaires puissants. Le coup d’Etat du fantasque général Aboudrahmane Tchiani, est dirigé avant tout contre le peuple Nigérien et ses acquis démocratiques, mais c’est aussi un pied de nez au monde civilisé, en particulier, à la France dont le Président Mohamed Bazoum, retenu en otage et séquestré, est un ami et partenaire de choix, comme il demeure le président, démocratiquement, élu des nigériens.
Les Nigériens, démocrates, républicains et patriotes forment une majorité silencieuse dont la voix est étouffée pour permettre à une minorité téléguidée, servile et vénale de donner de la voix pour faire croire au monde qu’une junte honnie de tous incarne une soit-disante vox populi.
A la France de sortir ses crocs pour montrer qu’elle est encore capable de mordre, si tant est qu’elle veut compter et se faire entendre, à nouveau, défendre son honneur bafoué et la dignité éprouvée de son grand peuple, humaniste et universaliste.
Dr Mohamed CAMARA
Image de la UNE : Emmanuel Macron lors de son discours sur la stratégie de la France en Afrique, lundi 27 février, à l’Elysée. — STEFANO RELLANDINI / POOL / AFP