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Restriction d’accès aux réseaux sociaux: Des diplomates dénoncent la junte : ‘‘la situation est pire qu’avant…’’

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La restriction imposée aux médias privés et aux réseaux sociaux par les autorités de transition, préoccupent les diplomates en poste à Conakry.

Cela fait près de deux mois que le CNRD a pris la décision de restreindre l’accès aux médias privés et aux réseaux sociaux sans aucune explication. Une décision qui suscite des vives préoccupations au sein de l’opinion publique et qui a des conséquences économiques et sociales incalculables.

Alors que le Syndicat des professionnels de la presse de Guinée (SPPG) appelle à une série de manifestations générales dans le Grand-Conakry, à partir du 18 janvier, pour protester contre le bâillonnement de la presse et à la restriction de l’accès à l’internet, les diplomates en poste à Conakry expriment leur vive préoccupation.

Au cours d’une rencontre ce mercredi avec le Chef de la diplomatie guinéenne, les diplomates en poste à Conakry dénoncent cette mesure imposée par la junte.

Pour l’Ambassadeur de la France,  actuellement, l’image du pays est affectée négativement et gravement.

« En ce qui concerne mon travail d’ambassadeur de France, je vois trois atteintes liées à cette situation qui me posent des difficultés. Je ne peux plus travailler depuis ma résidence avec mes moyens de communication dédiés avec le ministère. La deuxième, c’est que quand je suis dans mon véhicule de fonction, l’instrument qui m’a été donné par mon gouvernement, n’est pas opérant. La troisième peut-être qui semble plus préoccupante, concerne les visas. Je travaille actuellement avec deux tunnels VPN dont l’un n’est pas opérant, ce qui fait je suis à 50% de ma capacité de délivrance des visas. Je pense que c’est quelque chose qui parle à tout le monde et je suis persuadé que je ne suis pas la seule mission diplomatique dont la mission consulaire est en ce moment affectée et impactée par les mesures d’ordre général.», déplore Marc Fonbaustier. Ajoutant qu’avec cette mesure, «  qu’il n’est pas facile aujourd’hui, pour nous ambassades, de convaincre des opérateurs économiques, de venir investir en Guinée quand ils ne sont pas certains de pouvoir communiquer, et informer normalement. Autrement dit, l’image du pays est actuellement affectée négativement et gravement », déplore le diplomate français

De son côté, l’ambassadeur de l’Allemagne en Guinée, n’a pas manqué de rappeler que le niveau atteint aujourd’hui par ces restrictions ne l’ont jamais été au temps d’Alpha Condé.

« Comme l’ont dit mes collègues, nous souffrons des problèmes de communication. En dehors de l’ambassade, je ne peux plus communiquer. C’est quelque chose qui gêne beaucoup dans le travail. J’ai 4 sur 7 collègues qui roulent à essence. Ça veut dire il y a une déjà qui va arrêter de venir à l’ambassade, elle va travailler à partir de la maison parce que son réservoir est à plat. Si ça continue encore la semaine prochaine et d’autres semaines, ça risque de nous amener à arrêter le travail à l’ambassade. Notre souci majeur par contre, c’est la situation de la liberté de la presse, la liberté pour les citoyens de s’informer. C’est une situation dommageable, et ça donne une très mauvaise image de la Guinée (…). Ça nuit beaucoup à l’image de la Guinée. Je suis un des plus anciens ambassadeurs en Guinée, j’ai vécu entre 2019 et 2020, sous le régime du président Alpha Condé, des restructurations. Malheureusement, je dois constater que maintenant, la situation est pire, bien que le gouvernement de la transition soit venu avec la position d’améliorer la situation. Dans le domaine de la liberté d’information et de presse, ce que le gouvernement de transition a décidé va plus loin que ce qu’Alpha Condé n’a jamais décidé », a rappelé S.E Ulrich Meier-Tesch.

 

En réponse, le Ministre guinéen des Affaires Etrangères et des guinéens établis à l’étranger, Dr Morissanda Kouyaté, a tout simplement déclaré  qu’:« Il y a un mot pilier qui a soutenu notre échange, c’est le mot amical. Les ambassadeurs nous ont dit qu’ils sont venus dans une démarche amicale. Et la Guinée est honorée de constater que nous ne sommes pas menacés, que nous sommes dans une amitié. Je voudrais leur remercier pour cette démarche et dire que la Guinée aussi, a reçu les ambassadeurs dans une atmosphère amicale. Les préoccupations qui ont été posées sont les préoccupations de tout le monde. Les difficultés qu’il y a dans les ambassades sont les mêmes difficultés dans nos ministères, quant aux des problèmes de connexion et même à la présidence. Le gouvernement n’a pas un VPN personnel pour dire qu’ils sont en dehors. Nous sommes tous affectés. Nous sommes affectés par un problème sécuritaire. On ne peut aller plus loin. Mais ensemble avec eux, nous allons pouvoir travailler pour résoudre ces problèmes et aller le plus tôt que possible. Nous sommes en développement, nous avons besoin de toutes ces choses mais tout ça, se discute quand il y a la sécurité. Ensemble avec eux, nous allons trouver le juste milieu, et voir comment la Guinée peut continuer sa marche vers la transformation de ce pays. Aux ambassadeurs, je les remercie pour la qualité des échanges, le respect et la considération ».

Dans un communiqué publié en mi-décembre, l’ONG Reporters sans frontières (RSF) a demandé aux autorités militaires de mettre « instamment » un terme à la série de mesures de restriction prises à l’encontre de certains médias privés, dénonçant des « atteintes à la liberté de presse d’une ampleur considérable ».

Pour rappel, la Guinée occupe le 85e rang sur 180 pays au classement mondial de la liberté de la presse publié par RSF en 2023.

Abdoul Wahab Barry

 

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