Contre La sansure

Sommet de la CEDEAO à Abuja: Des juntes en sursis, des populations condamnées

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Un proverbe chinois enseigne « un imbécile qui marche ira toujours plus loin que deux intellectuels assis”. C’est exactement la moralité des relations des juntes au pouvoir avec le reste du monde.

Pendant que les partenaires ont des scrupules à les punir, hésitent à répondre au coup par coup pour une raison ou une autre, les putschistes, pour leur part, continuent, mine de rien, de tisser leur grosse toile d’araignée. Ils ont fini par croire qu’ils ont pris le dessus sur tout le monde, que c’est à eux désormais de dicter la marche du monde et de fixer les règles du jeu.

Quand leurs contempteurs prennent des gants, avancent masqués, louvoient, eux, ont la gâchette facile, se comportent comme des éléphants dans un magasin de porcelaine. Ils ont l’avantage de l’audace des imbéciles tandis que les autres pêchent par les précautions de la personne sage, responsable, réfléchie et prudente. D’une décision reportée à l’autre contre leurs bavures et dérives, les chefs des juntes ont tiré leur longévité, leur sentiment de toute-puissance, finalement, en ont fait le lit de toutes leurs outrances. Quand enfin, se résoudra-t-on pour en finir avec ces règnes sauvages et liberticides à répondre au coup de pied de l’âne par un coup de pied ?

En attendant la décantation d’une situation qui n’a que trop duré et fait tant de mal, les Chefs d’Etat de la CEDEAO se sont réunis en sommet ordinaire le dimanche 7 juillet 2024,. C’était au lendemain, de la promenade de santé des écumeurs de L’AES, association des Egarés et des Sots du Sahel, venus à Niamey pour agiter l’épouvantail d’une guerre de sécession au sein de la CEDEAO. Comme à son habitude, cette institution s’est encore illustrée dans l’ambiguïté de la politique du bâton et de la carotte.

La majorité des chefs d’Etat ont souhaité que le départ volontaire et spectaculaire de la CEDEAO du Mali, du Niger, du Burkina trois pays enclavés et totalement dépendants de leurs voisins,  soit acté et entériné, bien sûr, en en tirant toutes les conséquences. Cela veut dire, comme l’a laissé entendre clairement le président de la commission, la vie dure pour les populations des pays concernés : des visas requis pour fouler les États encore membres de la CEDEAO, la suspension ou l’annulation pure et simple de programmes et financements en cours initiés par l’organisation sous-régionnale, l’application de lois nationales aux ressortissants des pays dissidents , par exemple, pour l’investissement et la création d’entreprises alors qu’ils bénéficiaient de droits et facilités dans le cadre des accords passés entre États membres de la CEDEAO notamment la libre circulation des biens et des personnes.

Le Mali, le Niger, le Burkina compte de nombreux ressortissants dans les États dont ils veulent se séparer. Pas moins de 8 millions, rien qu’en Côte d’Ivoire. Il y a plus de Maliens, nigeriens, Burkinabé ailleurs qu’ils n’y a d’étrangers chez eux. Ils ont plus d’intérêts donc avec les autres que ceux-ci n’auraient besoin d’eux. En clair, ce sont les populations de l’AES , Association des Egarés et des Sots du Sahel qui payeront la facture, trés lourde, des actes de fanfaronnades de leurs dirigeants de fait qui se prennent pour des rédempteurs et sont convaincus dans leur vanité absurde d’être le nombril du monde.

Quand des citoyens dans les zones rurales très éloignées des capitales qui leur sont souvent inaccessibles à cause de l’enclavement ou de l’impécuniosité vont devoir s’y rendre pour accomplir des formalités de visa afin d’entrer dans l’espace CEDEAO, chacun se rendra compte de l’enfer de l’AES. Quand les hommes d’affaires devenus très propspères chez les voisins vont voir leurs activités menacées, leurs entreprises péricliter du fait des contraintes qui vont leur être imposées, le conte de fée va tourner au cauchemar du dépôt de bilan. Dès lors, au fur et à mesure que l’on s’approche de l’échéance fatidique de la riposte de la CEDEAO, l’on comprend le vent de panique qui souffle dans le grand désert de l’AES, un cercueil ambulatoire.

Les Chefs d’Etat, peut-être, plus conscients de la détresse à venir des populations que ceux qui en ont la charge, tout en enclenchant le processus de l’isolement du Mali, du Bénin, du Niger, un éteignoir à venir pour leurs populations, mettent la pédale douce en confiant au Président sénégalais Diomaye Faye une médiation de la dernière chance. A priori, cette mission qui sera conduite conjointement avec le Président Togolais Faure Eyadema, qui a une meilleure fibre putschiste que ses pairs, s’avère impossible, car les renégats, sûrs de leur fait, assurés de l’impunité, campent sur leurs positions insensées.

Ils trouvent dans la rébellion, une capacité à mobiliser, des ressorts de survie. Les couleurs avaient déjà été annoncées à Ouagadougou où des groupuscules à la solde du pouvoir de transition avaient battu le pavé devant l’ambassade du Sénégal pour marquer leur désaccord avec la démarche du Président sénégalais visant à réintégrer au sein de la CEDEAO les juntes égarées et réfractaires. Pareil scénario pourrait se reproduire pendant la visite des emissaires de la CEDEAO dans le bloc des marginaux afin de les dissuader dans leur médiation quand on sait que les chefs militaires ont toujours procédé ainsi pour affirmer leur légitimité, fuir leurs responsabilités.

La CEDEAO, légaliste, veut mettre à profit le délai d’un an statutaire pour se retirer de ses instances, une fois, qu’on en a fait la demande, pour essayer de ramener à la raison l’association des Egarés et des Sots du Sahel. Conciliante aussi, elle ne voudrait pas tirer trop sur la corde. Mais, elle sait qu’il lui faudra à un moment ou à un autre se résoudre à l’impossible entente avec des fous du pouvoir, au ménage non moins impossible avec une bande de hors-la-loi et d’ennemis publics. D’ici là, il n’est pas exclu que les putschistes, tous aux abois, tombent du haut de leur piédestal d’illusions et de pires monstruosités.

La dictature n’a jamais longue vie !

Samir Moussa

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