Sommet UA-UE: le partenariat gagnant-gagnant, entre mots et maux!
Les Africains ont-ils parlé, ce lundi24 novembre 2025 à Luanda, d’une seule voix, en privilégiant l’intérêt général contre des visions nationalistes étriquées? Les Africains ont-ils su partager avec l’Europe, leur volonté de changer de statut, en se débarrassant de leurs casquettes de «fournisseurs» de matières premières et de «consommateurs attitrés» des produits finis venus d’ailleurs? Les Africains se sont-ils résolus à abandonner leur posture de continent ne vivant que de cette aide qui ne les a jamais…aidés à prendre le train du développement? Les Africains ont-ils réussi à se positionner pour, non-seulement le véritable partenariat, mais surtout celui dit «gagnant-gagnant»? En somme, les Africains ont-ils trouvé leur compte en terre angolaise, durant cette rencontre qui a rassemblé près de 80 dirigeants du continent et d’Europe, pour parler, entre autres, relations commerciales, minerais stratégiques, paix, prospérité, migration?
Septième du genre, et troisième se tenant sur le continent noir, le sommet Union africaine et Union européenne (UA-UE), plus que de simples agapes entre têtes couronnées, devrait constituer un tournant décisif, voire un nouveau départ dans la relation entre l’Afrique et l’Europe. «Promouvoir la paix et la prospérité grâce à un multilatéralisme effectif», c’est, d’ailleurs, la thématique qui a servi de pilier à la réunion. Elle est, du reste, assez évocatrice d’une volonté, il faut l’espérer partagée, d’un changement de paradigme, dans un monde en mutation, pour ne pas dire en total bouleversement. Une planète terre où les conflits de toutes sortes, le commerce inéquitable, les ruses et tromperies opérées par le biais des innovations technologiques dont l’incontournable Intelligence Artificielle, et le changement climatique, règnent en maîtres absolus, au détriment d’une Afrique noire qui «est mal partie», selon les adeptes de la théorie négationniste de René Dumont.
Longtemps couverts par le sceau de la condescendance, elle-même portée par le péché originel de la colonisation, et les artifices d’une aide qui n’a jamais contribué au développement de «l’aidée», les rapports entre les deux continents ont toujours été ceux de dominant et de dominé, l’Afrique, étant l’éternelle assistée. Tout concourt à maintenir entre elle et ses «partenaires» européens des relations qui lui profitent peu ou prou. L’Afrique, c’est le continent où les droits de l’homme sont foulés au pied. L’Afrique, c’est le continent des guerres oubliées comme celles du Soudan et de l’est de la République du Congo. L’Afrique, c’est le réceptacle des crises humanitaires, notamment de la famine comme en Somalie et en Ethiopie, des maladies, de la pauvreté, et désormais du terrorisme qui s’est enkysté dans le Sahel et s’invite de plus en plus dans les pays du Golfe de Guinée. L’Afrique, c’est aussi le continent où la mauvaise gouvernance et la corruption sont décriées à toutes les tribunes occidentales comme des plaies purulentes et inguérissables. L’Europe en vient presqu’à oublier que c’est l’argent détourné en Afrique, par les Africains, souvent avec la complicité active ou passive de leurs «partenaires», qui fait tourner à plein régime, nombre de ses banques et favorise l’acquisition de tous ces biens qui deviennent «mal acquis» dès que leur propriétaire n’est plus en odeur de sainteté avec ses anciens maîtres.
En tout cas, il importe de porter un autre regard sur les relations entre l’Afrique et l’Europe, afin de les purifier de toutes ces tares qui les vicient. Maintenant qu’une société civile véritable prend, de plus en plus corps en Afrique, et que les populations aspirent à un réel mieux-être, et l’exigent dans la dignité humaine, le narratif qui fait du continent, celui «qui n’est pas encore entré dans l’histoire», devrait mourir de sa propre mort. D’ailleurs, toute autre option serait suicidaire pour le monde entier, car favoriserait et multiplierait les crises et les migrations, traînant avec elles leur lot de morts et de maux. Question: n’est-ce-pas le sous-sol de l’Afrique dont les richesses sont pillées ou bradées à satiété, qui sert de carburant à bien des économies européennes?
Nul doute que de part et d’autre, à moins que le sommet de Luanda ait été une grande foire de plus, où l’hypocrisie fut la chose la mieux partagée, le multilatéralisme pourrait bien devenir «effectif», pour «un partenariat robuste, équilibré et tourné vers l’avenir», comme l’espère le président du Conseil européen, Antonio Costa.
Par Wakat Séra

In. https://www.wakatsera.com/sommet-ua-ue-le-partenariat-gagnant-gagnant-entre-mots-et-maux/
