Contre La sansure

Tibou ou l’art de pleurer avec des gants blancs

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Il faut avoir une mémoire courte, ou un culot de fer, pour venir donner des leçons d’humilité aux Guinéens après avoir passé sa vie entière dans le cirque politique. Tibou Kamara parle de « théâtre des vanités » ? Très bien, mais qui mieux que lui a occupé toutes les premières loges, changeant de costume au gré des régimes, toujours prêt à jouer son rôle ?

Aujourd’hui, il se déguise en sage, cite Zeus, Chateaubriand et Dieu pour nous expliquer que l’homme est fragile et que la vanité est un poison. Mais à qui veut-il faire croire qu’il s’est soudain découvert une vocation de prophète ? À force d’empiler les références comme un écolier qui veut impressionner son maître, il finit par étouffer le fond : il ne dit rien de concret.

La vérité, Tibou la connaît, mais il n’ose pas la dire. Ce ne sont pas des malédictions divines qui emportent les maisons, ce ne sont pas les colères de Zeus qui arrachent des vies. Ce sont les constructions anarchiques, l’absence de planification, la corruption dans les permis, l’impunité des autorités. Bref, le système qu’il a servi avec zèle.

Il ose écrire : « Placer l’homme qu’il ne faut pas à la place qu’il ne faut pas, c’est comme mettre un éléphant dans un magasin de porcelaine. » On dirait presque une confession. N’a-t-il pas été lui-même cet éléphant parachuté là où l’on avait besoin de loyauté plutôt que de compétence ?

Qu’on soit clair : le deuil national n’est pas une opportunité pour les anciens acteurs du désastre de revenir jouer les sages. Le pays pleure, les familles souffrent. Elles n’ont pas besoin de grands sermons, elles ont besoin de routes solides, de canalisations entretenues, d’urbanisme sérieux. Elles ont besoin d’ingénieurs, pas de rhéteurs.

Tibou veut nous faire croire qu’il s’élève au-dessus des vanités. Mais en réalité, il ne fait qu’ajouter une couche de théâtre au théâtre. Ce n’est pas une tribune, c’est une tentative de réhabilitation personnelle. Et ça se voit comme le nez au milieu de la figure.

La Guinée n’a pas besoin de faux prophètes qui pleurent avec des gants blancs. Elle a besoin de bâtisseurs qui mettent les mains dans le béton, pas dans les belles phrases.

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