Transition en Guinée : ‘’On a l’impression que la justice, c’est pour les autres, mais pas pour le CNRD’’
Dr Amadou Sadjo Barry, analyste politique et professeur de philosophie au Canada, a livré, ce mardi 27 décembre, sa lecture sur la conduite de la transition et l’organisation dialogue par le CNRD. Il soulève plusieurs dysfonctionnements dans la gestion de ce processus par la junte au pouvoir.
L’analyste politique décèle un problème structurel dans l’organisation du dialogue par le Comité national du rassemblement pour le développement (CNRD).
‘’On a une autorité nationale, en l’occurrence le CNRD, qui présente un agenda de retour à l’ordre constitutionnel, qui s’inscrit dans une logique de refondation de l’Etat et qui propose une chose qui ne fait pas l’unanimité. Malgré tout le CNRD décide de définir l’ensemble du processus, les règles du jeu, les modalités alors que lui-même est un protagoniste. Dans tous les processus politiques que j’ai pu analyser jusque-là, c’est du jamais vu’’, fait remarquer Dr Amadou Sadio Barry sur Fim.
‘’Une personne qui propose un chronogramme sur la transition qui ne fait pas l’unanimité, ne devrait pas définir l’ensemble du processus censé réconcilier les protagonistes (…). Lorsque Saïd Djinnit venait à Conakry, ce n’est pas Alpha Condé qui fixait les règles du jeu. Il proposait et les partis politiques aussi en retour proposaient quelque chose qui puisse mettre en place un dialogue où les gens discutent sur des problématiques sur lesquelles ils ne s’entendent pas. Donc cela un problème structurel qu’il faut révéler’’, ajoute-t-il.
Ce philosophe comprend la décision de Dalein et Cie de ne pas prendre au cadre de dialogue mis en place par le CNRD. Dr Barry assure qu’aujourd’hui, les soupçons qui pèsent sur la junte sont raisonnables.
‘’Lorsque vous avez un cas qui est pendant devant la justice et qu’on vienne démolir votre maison, humainement, vous avez toutes les raisons du monde de vous méfier de cette justice. Lorsque vous présentez tous les arguments qui montrent qu’il y a eu un décret, bien que ce soit un bien de l’Etat et que vous avez procédé de manière à ce que ce bien vous revienne, dans le cas de Sidya Touré, c’est ce qu’il a été montré comme preuve, malgré tout, on décide de vous expulser et d’attribuer votre maison à des artistes ou écrivains. Franchement, il y a de quoi se méfier de la justice’’, assure-t-il.
‘’Lorsqu’on voit la manière dont les cas Kassory, Foniké Mengué et autres sont traités, il y a des raisons valables de se méfier de la justice guinéenne (…). On a l’impression que la justice, c’est pour les autres, mais pas pour le CNRD. Lorsqu’on limoge la ministre de la justice sur des arguments qui ne sont pas du tout valables sur le plan judiciaire, personne ne parle. Aujourd’hui en Guinée, qui peut saisir le CNRD sur sa gestion des ressources minières ? Personne’’, poursuit cet analyste politique.
Ce professeur estime que Sidya Touré et Cellou Dalein Diallo ont de bonnes raisons de vouloir que le dialogue se tienne hors de la Guinée.
‘’C’est parce qu’ils n’ont pas confiance au CNRD. Dans ce que vous appelez ‘dialogue inter-guinéen, lorsque vous choisissez les personnes avec lesquelles vous dialoguez, vous n’êtes plus dans un dialogue. On a demandé aux autres de venir avec des règles de jeu déjà définies. Je ne peux pas venir autour de la table du dialogue avec une personne qui usurpe mes biens et qui définit la manière dont les biens doivent être restitués’’, indique Dr Amadou Sadio Barry.
Pathé BAH, pour VisionGuinee.Info
In. https://www.visionguinee.info/transition-en-guinee-on-a-limpression-que-la-justice-cest-pour-les-autres-mais-pas-pour-le-cnrd/