Crief: “Kassory refuse un procès de façade”
En détention depuis le 6 avril 2021 à la Maison centrale de Conakry, les anciens dignitaires du régime Alpha Condé attendent toujours leur procès. Le procureur spécial de la Cour de répression des infractions économiques et financières veut aller vite au procès.
La défense s’oppose à “la décision de renvoi de l’ancien premier ministre pour jugement pris par le procureur spécial de la Crief, Aly Touré. Elle dénonce “un procès de façade” auxquels ne participeront pas son client, a-t-elle fait savoir au cours d’une conférence de presse, ce vendredi 3 février 2023
Le sénégalais, Me Ousmane Saïd, l’un des avocats de l’ancien Premier ministre, Kassory Fofana, s’est étonné que ce soit “la première fois que le procureur dise que Monsieur Kassory est poursuivi pour avoir détourné 15 milliards. De l’enquête préliminaire jusqu’à maintenant, nous avons toujours demandé de nous dire ce que nous avons détourné, où, comment et quand ? Ils ne l’ont jamais dit. C’est aujourd’hui qu’ils se réveillent un beau matin, pour nous dire qu’ils renvoient Monsieur Kassory pour avoir détourné 15 milliards. Il y avait un projet qu’on appelle MAMRI dont le budget s’élevait à 15 milliards. Je ne peux pas croire qu’un juge ne sait pas ce que c’est un budget. Mais ils savent qu’un budget n’est pas disponible, on va le chercher, ils font exprès. Kassory n’a jamais géré le budget de la MAMRI, c’est établi. Comment on peut bouffer un budget prévisionnel ? (…). Monsieur Kassory n’a jamais pris, comme les autres premiers ministres, ses fonds spéciaux pour les mettre dans son compte. Il a laissé sur le compte de la primature, plus de 2 milliards».
Et d’ajouter “On dit qu’il a volé 15 milliards, c’est faux. On veut le liquider politiquement, c’est cela la vérité. C’est une liquidation politique et pas judiciaire.”
La défense pose des conditions
Pour participer au procès, le collectif d’avocats de la défense pose des préalables. “Pour qu’il y ait procès, nous posons deux conditions. La première condition c’est que tous les dossiers pendant devant la cour suprême, qui ont été initiés au compte de l’instruction et de l’information de cette affaire, soient vidés par la cour suprême d’abord. On ne peut pas aller comme ça, alors qu’il y a des incidents de poursuite devant la cour suprême, tendant à la liberté en liberté de Monsieur Kassory, nous dire vous allez en jugement, ce n’est pas possible. La deuxième condition c’est qu’il faut que ce jugement soit diffusé publiquement sur les télévisions et les radios. Pour que tout le peuple de Guinée, au nom duquel la justice est rendu, soit témoin de la procédure des faits. Il faut que le procureur précise cette histoire publiquement devant le peuple guinéen. Il faut qu’il le fasse. C’est à ces conditions seulement qu’il peut y avoir procès. Nous voulons et souhaitons qu’il y ait procès, parce que nous sommes pressés de voir Monsieur Kassory libre mais il faut qu’il y ait témoins. Il ne faut pas, en catimini, qu’on organise un procès et qu’on vienne nous livrer une sentence écrite depuis longtemps. Nous sommes convaincus maintenant que nous sommes en face des personnes conscientes, des magistrats compétents, qui connaissent le droit mais quelque part, nous soupçonnons une manipulation, et nous n’accepterons pas. Nous voulons un procès équitable. Nous sommes prêts à avoir un procès diffusé largement par les radios et télévisions ici en Guinée et nous ferons face. Sinon, nous préférons enlever nos noms, laisser Monsieur Kassory entre les mains de ses bourreaux et ils en feront ce qu’ils veulent”.
A date, selon la défense, le mandat de dépôt amenant l’ancien Premier ministre et ses deux anciens ministres [Mohamed Diané et Oyé Guilavogui] en prison n’existe pas à la Maison centrale et n’existe nulle part d’ailleurs. «A défaut de trouver des preuves, on a opté pour une parodie de justice, aller très rapidement au jugement et obtenir une condamnation sur la base du néant pour empêcher nos clients de pouvoir être candidats aux échéances prochaines. C’est le seul objectif. Nous, nous sommes convaincus que le fait de mettre la vitesse dans la procédure pour aller au jugement, c’est pour disqualifier nos clients. Pour nous, cela est inacceptable. Déjà en amont, nous avons décidé de dénoncer ce qui est en train de se préparer et qui va se produire au préjudice de nos clients. Tout ce qui a été fait depuis le début jusqu’à aujourd’hui, tendait vers la réalisation de ce dessein. Ce dessein triste pour notre pays », a déplore l’ancien bâtonnier, Me Djibril Kouyaté.
Un procès de façade
Me Sidiki Bérété s’en prend vertement au procureur spécial des Crief, Aly Touré. “Le procureur sous ordre de la transition cour pour organiser un procès de suicide. Mais, nous lançons le défi qu’il n’y aura pas de procès tant que la Cour suprême ne termine pas. Nos clients vont comparaître en prévenus libres. Ils ne feront pas de procès tant qu’ils sont en détention. Dr Kassory, refuse un procès de façade. Diané refuse un procès de complaisance. Ils iront au procès en tant que prévenus libres. Que la manipulation cesse. On a fini d’humilier la magistrature, la profession des magistrats en République de Guinée. Meme au temps de régime Conté, on n’a pas agenouillé le droit à ce point. Vous ne voulez pas un procès. Parce que nous, on ne va pas venir contribuer à la mort du droit pénal en République de Guinée. Il ne faut pas tromper le peuple. Le droit n’a jamais été aussi agenouillé de l’histoire de la Guinée que sous la phase de cette transition”, a dénoncé Me Bérété.
Abdoul Malick Diallo
pour Afriquotidien.com