Contre La sansure

Guinée: Analyse du dernier rapport de la Banque mondiale sur les défis Économiques et les opportunités de transformations du pays.

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Bien que dotée d’un sous-sol riche en ressources minières et d’un potentiel agricole significatif, la Guinée demeure l’un des pays les plus pauvres d’Afrique. Un rapport récent de la Banque mondiale paru ce mois de juin 2025 offre une analyse approfondie de la situation économique, sociale et institutionnelle du pays.

Composée de 19 pages, cette étude se veut un guide essentiel pour comprendre les enjeux actuels de la transition politique amorcée après le coup d’État de septembre 2021.

Cette synthèse examine les principaux axes du rapport portant notamment sur la gouvernance, l’économie informelle, la dette publique, les inégalités sociales, les infrastructures énergétiques, et les perspectives de développement durable.

Il s’agit de mettre en lumière non seulement les diagnostics posés par la Banque mondiale, mais aussi les recommandations clés susceptibles de guider les politiques publiques dans les prochaines années.

1. Situation Macroéconomique sur fond d’un redressement fragile 

Selon le rapport, l’économie guinéenne a enregistré un taux de croissance d’environ 5 % en 2023, principalement soutenu par le secteur minier (bauxite, or et fer). Cependant, cette croissance est vulnérable aux chocs externes, comme les fluctuations des prix des matières premières.

Depuis 2021, la junte militaire a promis de réformer les contrats miniers et de mieux redistribuer les revenus. Pourtant, la Banque mondiale souligne la faiblesse des recettes fiscales, compromise par l’évasion fiscale, la corruption et une économie informelle qui concerne près de 85 % de l’activité économique.

Bien que le déficit budgétaire soit contenu, la dette publique continue de croître à cause des emprunts extérieurs, notamment auprès de la Chine. Cette dette est gérable à court terme, mais pourrait devenir problématique si l’économie n’est pas diversifiée et que la croissance n’est pas inclusive pour générer des recettes diversifiées et durables.

Car « la croissance correspond, pour une nation, à une augmentation soutenue et durable – pendant une période suffisamment longue – de la production de biens et de services appréhendée par des indicateurs comme le PIB ou le PNB».

«Étant donc une notion quantitative et plus abstraite, il peut y avoir de croissance sans développement et inversement du développement sans croissance».

2. Gouvernance et Gestion des Ressources : Des réformes en demi-teinte 

Le rapport insiste sur la nécessité urgente de renforcer les institutions de l’État et de restaurer la confiance dans la gestion des ressources publiques. La Banque mondiale relève avec préoccupation la persistance de la corruption, le manque de transparence dans les marchés publics, et les difficultés d’accès à la justice.

Malgré des efforts pour moderniser les administrations et restructurer certaines entreprises publiques depuis le changement de régime, ces initiatives manquent souvent de suivi opérationnel et de financement adéquat.

Concernant la gestion des ressources naturelles, le rapport préconise une forte implication des communautés locales et un meilleur partage des bénéfices de l’exploitation minière pour réduire les tensions sociales dans les zones exploitées.

3. Inégalités et Pauvreté persistantes

Bien que la Guinée soit riche en ressources minières et énergétiques, elle figure parmi les pays les plus inégalitaires d’Afrique subsaharienne.

D’après la Banque mondiale, plus de la moitié de la population vit sous le seuil national de pauvreté, avec des disparités marquées entre les zones urbaines et rurales.

L’accès aux services de base – eau potable, électricité, santé et éducation – demeure limité, surtout à la campagne. Le taux de scolarisation est bas et la qualité de l’éducation insuffisante pour préparer les jeunes au marché du travail.

Le rapport alerte sur le risque d’une crise sociale aggravée si les bénéfices de la croissance ne sont pas mieux redistribués, et recommande une réforme urgente du système de protection sociale, avec un accent particulier sur l’emploi des jeunes.

4. Secteur Énergétique : Entre espoirs et réalités des faits. 

Le secteur énergétique est crucial pour toute stratégie de développement industriel, mais il rencontre d’énormes problèmes en raison d’une production instable et d’une distribution inefficace. Bien que des projets hydroélectriques ont été créés ces dernières, tels que celui du barrage de Souapiti, la mise en œuvre concrète de ces projets ne correspondent pas aux ambitions affichées.

Le coût élevé de l’énergie constitue un frein pour les entreprises et les ménages, entravant l’investissement privé et la compétitivité nationale. Un appui technique et financier international est nécessaire pour surmonter ces défis énergétiques.

5. Perspectives et Recommandations : 

Le rapport conclut par des recommandations claires :

– Diversifier l’économie pour réduire sa dépendance au secteur minier.

– Renforcer les capacités institutionnelles et lutter contre la corruption.

– Améliorer l’accès aux services de base, surtout en zone rurale.

– Soutenir les microentreprises et les coopératives agricoles pour favoriser l’emploi.

– Investir dans l’éducation technique et professionnelle pour aligner les compétences aux besoins du marché.

Dans le contexte actuel sur fond d’une transition politique trompe l’œil qui ne rassure pas du tout les investisseurs étrangers, le rapport recommande un dialogue inclusif impliquant les acteurs politiques et de la société civile, les partenaires techniques et financiers, ainsi que les représentants des régions les plus marginalisées.

En conclusion, la Guinée dispose de nombreux atouts pour initier un véritable développement économique et social. Comme le démontre le rapport de la Banque mondiale, cela requiert des réformes courageuses, une gouvernance transparente et une volonté politique sincère de placer les citoyens au cœur des priorités.

Alors que le pays se trouve à un tournant décisif de sa transition, les décisions stratégiques prises aujourd’hui détermineront son avenir pour les décennies à venir. L’enjeu est considérable, mais les solutions existent. Il est maintenant temps de passer de l’analyse à l’action.

Par BARRY Aboubacar Tely.

 

In. https://african-panorama.com/2025/07/05/guinee-analyse-du-dernier-rapport-de-la-banque-mondiale-sur-les-defis-economiques-et-les-opportunites-de-transformations-du-pays/

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