Illégalité des actes de Mamadi Doumbouya après l’annonce de la présidentielle : vers des poursuites judiciaires contre les receleurs de ses décrets
Chronique du baroudeur baroudé dans sa propre ruse. Il arrive un moment où la loi ne discute plus, elle tranche.
Et ce moment est arrivé.
Le principe de neutralité de l’État n’est pas une faveur que l’on concède à l’opposition :
c’est le verrou sacré de toute République, le fil d’équilibre entre le pouvoir et la tyrannie.
Quand un chef d’État s’y soustrait, il ne gouverne plus , il règne.
Et quand il règne sans légitimité, il trahit. La démocratie n’est pas un terrain d’exercice militaire.
C’est un rituel civique, où le droit a la préséance sur la force. Et dans ce rituel, Doumbouya vient de franchir la ligne rouge : en continuant à signer des décrets après l’annonce de la présidentielle, il agit hors-la-loi, et traîne dans sa chute tous ceux qui authentifient, exécutent ou profitent de ces actes.
Le baroudeur s’est baroudé. Pris à son propre piège.
En droit électoral, dès que la date du scrutin est fixée, la République entre dans ce qu’on appelle la période de neutralité.
À partir de cet instant, tout acte gouvernemental à incidence politique, financière ou symbolique est gelé par principe de prudence constitutionnelle.
Le président sortant, s’il veut se présenter, doit quitter le pouvoir. Pas demain, pas après-demain. Maintenant.
Six mois avant, disent les bons codes. Deux mois avant, disent les plus souples. Mais tous disent une chose : qu’il parte. Or, Mamadi Doumbouya a choisi de rester, de régner, de manipuler l’appareil d’État comme un instrument électoral.
Il nomme, il promeut, il dépense, il achète les silences , et croit gouverner. Mais en réalité, il usurpe une autorité qu’il n’a plus.
Car à partir de l’annonce du scrutin, tout chef d’État-candidat perd le droit de signer au nom de la République. Il agit en fraude de la loi.
Et ses décrets ne valent plus que ce qu’ils pèsent dans l’illégalité : des papiers souillés de vanité, sans valeur juridique, promis à l’annulation.
Le 28 décembre 2025 sera jour d’élection.
À compter de ce jour, le compte à rebours du droit a commencé.
Deux mois avant , soit le 28 octobre, tout candidat potentiel occupant une fonction publique devait démissionner. C’est la règle. C’est la loi. Et la loi ne négocie pas.
Or Doumbouya n’a pas quitté ses fonctions.
Il a préféré conserver la couronne tout en déposant son bulletin.
Il a voulu être le joueur et l’arbitre, le juge et le parti.
Erreur fatale.
Le droit électoral est clair : celui qui ne remplit pas les conditions d’éligibilité à la date prévue n’est pas candidat.
Il est hors concours. Aucune validation de la CENI ne peut le sauver. Aucune propagande ne peut lui rendre ce que la loi lui a retiré : la qualité d’éligible.
Et qu’on se le dise : cette disqualification ne se plaide pas, elle s’applique. Elle est automatique.
Elle fait de Doumbouya un homme sans titre, un président sans pouvoir, un candidat sans existence légale.
Mais le drame ne s’arrête pas à lui.
Car chaque décret signé depuis l’annonce de la présidentielle est une pièce à conviction.
Et chaque main qui l’a exécuté , ministres, directeurs, comptables, officiers, juges dociles , en devient le receleur.
La loi sur la responsabilité administrative et pénale des agents publics prévoit que nul n’est tenu d’exécuter un ordre manifestement illégal.
Or, exécuter un décret émis par un chef d’État devenu inéligible, c’est justement cela : un ordre manifestement illégal.
Ceux qui les appliquent s’exposent à des poursuites pour complicité de forfaiture,
et ceux qui en profitent, à des poursuites pour recel d’actes illégaux.
Le ver est dans le décret.
Et la justice, tôt ou tard, en fera la lecture.
Depuis ce jour, la Guinée vit sous une autorité suspendue, une République sous séquestre.
Les institutions sont figées dans la peur, les magistrats réduits au silence, et la loi, elle, se tait d’un calme terrible :
celui qui précède les grands jugements.
Car l’illégalité n’est pas seulement une faute, c’est une contagion.
Et Doumbouya en a fait un régime.
Mais le temps de la loi est un fleuve : il contourne les barrages et finit toujours par atteindre la mer.
Le baroudeur s’est baroudé. L’homme qui voulait tout contrôler a perdu le seul pouvoir qui compte : celui d’être dans son droit.
Il peut encore signer, menacer, punir ou nommer, mais il ne gouverne plus au nom de la République. Il règne par habitude, non par légitimité.
Et chaque décret qu’il émet aujourd’hui n’est plus un acte d’État , c’est un document de preuve.
La loi l’a déjà condamné,
le temps viendra où la justice n’aura plus qu’à lire la sentence.
Quand la loi est violée, elle se tait un moment.
Mais ce silence n’est jamais celui de la mort : c’est celui du retour. Et quand elle revient, elle ne frappe pas le mensonge , elle le dévore.
Mamadi Doumbouya croyait défier le droit.
Il a oublié que le droit est patient, mais implacable.
Et dans ce pays où la mémoire du peuple s’écrit dans la douleur, celui qui confond pouvoir et immunité finit toujours par être jugé au nom de ce qu’il a trahi : la République.
