Les injustices de la justice ‘’boussole’’ de la transition du CNRD
Au lendemain du coup d’Etat du 5 septembre 2021, les nouvelles autorités militaires de la Guinée, ont promis de faire de la justice la boussole de la transition. La chanson était tellement bien composée qu’elle résonnait dans les oreilles tel un coup de marteau sur l’enclume. Malheureusement, la boussole annoncée était d’ores et déjà en panne mais aucun Guinéen ne l’avait remarqué.*
C’était exactement le lundi 6 septembre 2021, que le chef du putsch à l’époque non reconnu en tant que Président, annonçait à la face du monde, que leur immixtion dans le jeu politique Guinéen, visait à soigner les maux dont souffre notre pays pour redonner espoir et la dignité à notre peuple. Au nombre des instruments qui allaient garantir cette rectification de la conduite politique du pays, figurait en bonne place la justice. Ainsi, il a promis de faire d’elle la boussole de leur transition de « trahison » maquillée sous le sceau de « prise de responsabilité ».
Il a ajouté que cette justice qu’on croyait être du droit, allait « orienter chaque Guinéen ». Certainement sur la conduite à tenir désormais par rapport à l’ensemble des actes qui devront être posés.
Avec la conscience endormie par l’euphorie, l’hypocrisie et la haine contre le système d’Alpha Condé, le peuple dans sa majorité, les ont acclamés comme l’ont fait nos devanciers pendant « les soleils des indépendances ». C’est donc un héritage de la naïveté et de l’ignorance que nous avons sauvegardé pour être perpétué.
Pourtant, dans le même discours de circonstances de lieu et de temps, il a été annoncé en l’absence de la justice et du droit, le retrait des documents de voyage des membres du gouvernement illégalement destitué. Ils ont été interdits au nom de la force et en l’absence des lois, de sortir du territoire national. Le gel de leurs avoirs en banque a été acté en violation de toutes les règles de procédure. Les banques primaires ont de sitôt avaler la pilule en toute gaieté sans penser aux conventions qui les régissent et la confiance qui définit le fiduciaire.
Toutes ces violations susmentionnées, étaient annoncées dans le même discours, mais personne n’a prêté attention. Sinon, chaque Guinéen épris de justice devrait comprendre à cet instant précis que la « boussole » annoncée était un enfant mort-né ou un discours populiste qui visait simplement à amadouer la conscience d’un peuple majoritairement non averti et qui est toujours attiré par des mélodies que par le sens des paroles des chansons qu’il écoute.
Les jours suivants, avec la nomination d’un empereur des poursuites, des dossiers furent présentés. Des montagnes de chiffres ont été construites sans ciment ni eau, au nom d’une fonction qui autorise des affabulations contre les enfants d’une République avec des lois de la croix.
Devant des micros et caméras de la presse, des procès « injurieux et dévalorisants » de leur gestion ont été tenus. Les acteurs les plus dérangeants ont été foutus en prison à cause des milliards annoncés, dont le temps semble n’avoir démontré ni l’encaissement, ni l’ordonnancement, ni le décaissement et ni le détournement.
Deux (2) ans après, les metteurs en scène de ces didascalies visiblement faites pour humilier des anciens dignitaires de haut rang, n’ont jamais réussi à prouver leur faribole. Malheureusement, semble-t-il, cela fait partie des instruments qui font fonctionner la boussole.
Dans un rôle similaire avec des données probantes et des indices concordants, des journalistes se font convoquer pour des faits de diffamation. La boussole au lieu d’orienter son aiguille sur faits révélés dans la presse, jubile sur les agissements des dénonciateurs pourtant protégés par la loi L041, portant prévention, détection et répression de la corruption et des infractions assimilées.
Dans cette République guidée par la boussole du général 4 étoiles, les magistrats qui ne sont pas disposés à humilier les hommes d’Etat qui ont précédé le règne obscur du CNRD, doivent se contenter de jouer le second rôle dans les juridictions de l’intérieur du pays. Ceux qui sont déterminés, hargneux à faire le « sale boulot » sadique pour des avantages indus de ce bas monde, sont élevés et protégés tant que leurs regards restent focus sur les anciens dignitaires, notamment ceux qui ont des ambitions politiques.
Pourtant, sous le règne de la même justice boussole, plusieurs princes du palais royal ont mordu à l’hameçon de la corruption et du détournement de deniers publics. Mais jamais ils n’ont été exposés ou humiliés. Il faut ne pas être en odeur de sainteté avec les membres de la cour royale, les gardiens et les courtisans du palais pour voir son dossier exposé sur la place publique.
Les quelques rares d’entre eux, contre lesquels des poursuites plus ou moins réelles ont été engagées, ont vu leurs dossiers passés sous silence sans aucun vacarme.
C’est également sous le règne de la justice boussole qu’un autre gouvernement a été dissout. Les membres de cette équipe ont été frappés par le même fouet de Safrin que ceux de la gouvernance d’Alpha Condé (confiscation des documents de voyage et gel des comptes bancaires).
Malheureusement, au vu et au su de tout le monde, en présence de l’instrument d’orientation promis par la transition pour assurer l’égalité entre les citoyens, ceux-ci ont vu leurs documents de voyage restitués et autorisés à sortir du pays. Quid du gel de leurs comptes bancaires ? Le sujet semble n’avoir été qu’un discours semblable à la colère d’un père contre son enfant.
Pendant ce temps, ceux contre lesquels les mêmes mesures illogiques et disparates avaient été prononcées, continuent de croupir en détention et d’autres assignés à leurs domiciles depuis plus de 2 ans. Personne ne s’interroge comment ceux-ci vivent ? Comment se soignent-ils ? Comment font-ils pour payer la scolarité de leurs enfants pendant que leurs avoirs restent confisqués sans procès ni procédure ?
Devons-nous continuer à croire aveuglément que la justice est la boussole de la transition face à de telles réalités ? Peut-on parler de l’égalité entre tous les citoyens devant la loi ? Le refrain populaire et loufoque appelé « refondation et rectification » ont finalement servi à quoi au juste ? Où sont les valeurs de la transition qui nous ont été vendues dans la charte ou la constitution provisoire du moment ? Quand est qu’ils prendront conscience pour revenir à la raison ?
Il faut savoir raison garder. Au mandingue, la sagesse enseigne qu’il n’y a que le pays de l’indulgence, de la pitié, de la vérité et la justice, qui se construit et qui se développe. La haine et la méchanceté ont toujours consumé et n’ont jamais construit un pays.
Les religions qui nous rassemblent, même si elles n’étaient pas vraies, mais leurs paroles font régner l’ordre et la loi. En leur absence, aucune morale ni règle de soumission à une autorité et à la loi n’allait exister à plus forte raison, réussir à s’imposer. Et puisque nous croyons en ces religions, pensons à ce qu’elles nous enseignent et à ce qu’elles promettent.
La mort est une évidence qui va s’imposer. La justice de Dieu va s’exprimer. Chacun rendra compte de ce qu’il a posé comme acte. Les injustices causées seront réparées. Les édifices bâtis sur du péché vont un jour s’écrouler sur la tête des héritiers. Chacun récoltera ce qu’il a semé ou ce qui a été semé par ses géniteurs en bien et en mal. Les exemples sont multiples et toujours près de nous. La nuit porte conseil, le dit-on.