Contre La sansure

N’est-ce pas l’occasion pour Cellou Dalein Diallo de réclamer alors les fauteuils dérobés ?

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Des élections truquées il y en a toujours eu en Afrique et très particulièrement en Guinée mais ce qui fait de notre cas une exception est que nous avons réussi une dribble extraordinaire dans le jeu car le fauteuil présidentiel semble avoir été transféré par derrière les rideaux entre potes deux ou trois fois à l’issue d’élections frauduleuses.

Tout d’abord, des rumeurs sur la victoire de Cellou Dalein Diallo en 2010 courraient à Conakry depuis belle lurette mais l’évidence semble être un peu plus palpable avec toutes les informations que nous tirons de ce procès du 28 septembre, surtout avec les déclarations de Dadis Camara. Tout le monde sait que les rumeurs sont rarement fausses à Conakry. Pour preuve, vous pouvez entendre parler d’une rumeur de décret présidentiel des jours avant l’annonce officielle de celui-ci comme si les murs avaient toujours eu des oreilles autour de nos rois. La seule fois que les rumeurs semblent s’être trompées légèrement c’est lorsqu’en septembre 2021 elles soulignaient que M. Condé était en train de planifier l’arrestation et l’incarcération du Colonel Doumbouya et le jour était même connu de tous, puis Pan ! voilà Doumbouya qui réussît un coup d’état et renversa Condé 3 à 4 jours avant la date annoncée par les professionnels des rumeurs. Tout de même la rue pronostiquait que ça n’allait pas bien au sommet et de ce côté-ci elle avait vachement raison.

Depuis le premier tour des élections présidentielles de 2010, la rue disait officieusement que Cellou Dalein avait remporté par un coup KO les élections et que les résultats avaient été falsifiés en faveur de Condé, par des tentacules obscurs que celui-ci avait au sein du régime bidon d’antan. Tout le monde avait entendu cette rumeur dès les premières heures de l’annonce des résultats. Pire, une autre rumeur souligna que Ben Sékou Sylla, président de la CENI de l’époque, sur son lit de mort avait écrit une lettre à Cellou pour demander pardon pour n’avoir pas pu empêcher les irrégularités électorales. Certaines langues se demanderaient bien pourquoi Cellou et son parti avaient mis une telle lettre sous silence et pourquoi ils ne s’étaient pas battus un peu plus fort pour défendre la plainte qu’ils avaient déposé pour réclamer leur incontestable victoire.

Pour revenir à nos moutons, lorsqu’en début 2011 Alpha prit le pouvoir, Dadis était exilé, en convalescence toujours soutenue et prolongée à Ouagadougou (Burkina Faso), Konaté était dans une mission mal inventée de préparation des forces de réserve africaines entre Paris et l’Afrique. Les rumeurs disaient que notre Général était entre les mailles de Condé et qu’il ne pouvait pas revenir en Guinée tant que celui-là était au pouvoir. Une telle rumeur a elle aussi eu raison car il a fallu attendre le lendemain du renversement du pouvoir de Condé pour voir Konaté planifier un retour, ou une visite de courte durée, en Guinée. Tout de même entre 2013 et 2015 plusieurs sorties de Konaté sur les médias laissaient entendre que Condé avait triché en 2010 et que ce fut Cellou qui avait remporté par un coup KO les élections. Cette version fut soutenue par Sidya Touré pendant un certain temps et voilà que maintenant Dadis, absent de la Guinée à l’époque, nous revient avec d’amples détails là-dessus.

Cependant, lorsque M. Condé préparait la fin de son premier mandat au goût inachevé, il ne pensait qu’à se maintenir au fauteuil présidentiel et donc en 2015, il était tellement sûr de pouvoir organiser des élections, les superviser et les gagner qu’il organisa des présidentielles à la hâte. Il les perdit flagramment, comme il avait perdu celles de 2010. Qui pouvait imaginer qu’un Condé opposant en 2010 qui avait réussi (de dehors du système) à manipuler le régime et truquer des élections, n’allait pas frauder une autre fois (du haut de son fauteuil royal) pendant qu’il avait la commande de tout le système et de tous les voyous experts en art de manipulation politique ? Pas moi ! Et alors, Condé, la tête baissée, fit toutes les culbutes et fit valider ses élections à lui par une commission douteuse de la CEDEAO et de l’UE. Cellou qui avait surement gagné les élections ne sécurisa pas sa victoire et se la fit chiper une seconde fois. C’est plus clairement, gagner flagramment la guerre et perdre dramatiquement la bataille ! Alors, Condé se réinstalla et renforça son pouvoir criant à qui voulait l’entendre que les manifestations de rue (2011 – 2014) et Ebola (2015) l’avaient empêché de réussir son premier mandat mais que ce second mandat (2015-2020) allait être de tout paradis. Pour une seconde fois, Cellou ne réclama pas très fort sa victoire et se fit soumettre aux bombardements répétitifs des faux appels au calme de la communauté internationale à la solde de Condé, mais aussi à la docilité tristement reconnue de son parti.

Dès le début de son deuxième mandat, Alpha commença à parler d’un éventuel troisième par médias interposés et causa ainsi une panique au sein de l’opposition uniquement pour empêcher celle-ci de se mobiliser et de se focaliser sur l’essentiel. Condé n’hésita pas d’agiter la Guinée au fur et à mesure et le manège marcha tellement fort que l’opposition s’occupa à manifester dans les rues sans jamais être satisfaite. Une énième fois la rue. Une énième fois des morts et des exilées, et beaucoup de familles endeuillées et fauchées. Le roi Alpha ne s’était surement pas trop trompé car le même Cellou qui avait accepté la défaite où elle n’existait pas en 2010-2011 venait encore de lui céder bizarrement le fauteuil en toute complaisance inféconde.

En 2020, croyant que s’il remportait de manière plus claire les élections il aurait eu le soutien de la communauté internationale Cellou se prépara d’une autre manière et fit centraliser les résultats électoraux par bureau de vote avec l’aide de la technologie, et remporta une troisième fois les élections présidentielles que Condé avait organisées et supervisé pour se taper un troisième mandat. Condé avait encore perdu la guerre mais pas la bataille. Alors, les tentacules obscurs se mirent à l’épreuve et confectionnèrent des résultats par détour en sa faveur. Lorsque Cellou voulu défendre sa victoire que Condé allait dérober par tact, le siège de son parti fut pris en otage par l’armée qui y siégea jusqu’à l’arrivée au pouvoir du CNRD de Doumbouya en septembre 2011.

Je n’ai cité ici que les élections présidentielles alors que les législatives, communales et communautaires étaient de loin plus entachées de fraudes par Condé et pour Condé durant tout son règne. Plusieurs questions me torturent énormément, parmi lesquelles : pourquoi aujourd’hui l’UFDG ne porte pas plainte contre X ou contre Alpha pour tripatouillages et crimes électoraux ? Autrement dit, maintenant que le voleur est connu et que l’objet volé est identifié pourquoi l’UFDG ne réclamerait-elle pas la restitution de ce qui lui revient de droit (son bien, son fauteuil présidentiel) ? Pourquoi la justice qui traite actuellement les évènements du 28 septembre 2009 ne saurait-elle pas s’occuper des contentieux électoraux de 2010, 2015 et 2020 ? Pour un gouvernement (CNRD) qui dit faire de la « justice sa boussole », n’est-il pas opportun de rendre justice et ouvrir la voie à la démocratie ?

Je rêve peut-être mais l’occasion qui semble avoir toujours fait le larron devrait cette fois-ci faire le roi ! Je suis de ceux qui croient que Cellou et l’UFDG devraient beaucoup plus se pencher sur ces dossiers jugeables que de penser à une énième élection qu’ils ne sauraient une énième fois pas sécuriser et qui a toujours en face le même système injuste ou sa copie falsifiée. A défaut, ils devraient solennellement remercier Konaté, Sidya, et maintenant Dadis pour avoir dit au moins une fois la vérité sur le tripatouillage électoral.

AK Diallo

The Bronx, New York

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