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Présidentielle au Sénégal : une campagne express, en plein ramadan, pour sortir de la crise

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Après un mois de tensions liées au report de l’élection présidentielle sénégalaise, le chef d’État et le Conseil Constitutionnel se sont finalement accordés jeudi sur la date du 24 mars, relançant la course électorale à 17 jours de l’échéance. Une décision qui présente d’importants défis pour les candidats, contraints à une campagne plus courte et qui se déroulera, pour la première fois, durant le mois de ramadan.

Au Sénégal, le feuilleton électoral semble désormais proche du dénouement. Après de nombreux rebondissements, le Conseil Constitutionnel s’est finalement aligné jeudi sur la date du 24 mars, annoncée la veille par Macky Sall, pour la tenue du premier tour de la présidentielle. Le chef de l’État a publié dans la foulée le décret fixant la période de campagne électorale du 9 au 22 mars, soit une durée de 13 jours. Les 19 candidats dont les dossiers avaient été validés pour l’élection du 25 février par le Conseil Constitutionnel se retrouvent à nouveau en lice.

L’annonce surprise, le 3 février, de l’annulation du scrutin par le président, à quelques heures du début de la campagne, puis son report par l’Assemblée nationale au 15 décembre 2024, avait suscité une vive colère au Sénégal et plongé le pays dans une crise politique.

Jugé « contraire à la Constitution« , ce report avait été invalidé par le Conseil constitutionnel, qui a également rejeté cette semaine la proposition du président, issue du « dialogue national« , d’avancer le scrutin au 2 juin.

« Le choix d’organiser l’élection le 24 mars est cohérent de la part des juges, qui avaient affirmé que la présidentielle devait avoir lieu avant la fin officielle du mandat de Macky Sall le 2 avril« , analyse Gilles Yabi, politologue et président du centre de réflexion sénégalais Wathi. « Aujourd’hui, l’attention doit très vite se déplacer sur l’organisation même du scrutin, qui va se dérouler dans un délai extrêmement serré« , souligne le chercheur.

Un scrutin en pleines fêtes religieuses

Mercredi, l’annonce de la nouvelle date de la présidentielle a généré un cafouillage. Le Conseil Constitutionnel avait d’abord affirmé que le premier tour aurait lieu le 31 mars, répondant à une requête de 15 partis d’opposition, qui l’avait saisi pour imposer une date. Jeudi, il s’est finalement aligné sur le 24 mars.

« On peut considérer que la date du 31 mars correspondait à une volonté d’avoir plus de temps pour l’organisation concrète du scrutin d’une part, et pour la campagne électorale de l’autre« , décrypte Gilles Yabi. « Mais elle correspondait aussi à la fête de Pâques, ce qui était perçu comme un problème« .

L’article 129 du code électoral sénégalais fixe la durée de la campagne à 21 jours avant le premier tour du scrutin. Mais pour éviter d’organiser le vote en pleine fête religieuse, le président a choisi de la réduire.

« Même si le Sénégal compte 5 % de chrétiens et 95 % de musulmans, la tradition est que les deux communautés célèbrent cette fête ensemble. Les chrétiens invitent les musulmans au repas« , explique Pape Khouma, conseiller spécial du président. « Par respect pour la communauté chrétienne mais également pour des soucis d’organisation, il était compliqué d’organiser le scrutin à cette date« .

Si la nouvelle date fixée pour le scrutin n’interfère pas avec la fête de Pâques, la campagne présidentielle coïncide, elle, avec le mois du ramadan, qui doit débuter autour du 10 mars. Le décalage initial du vote au 15 décembre avait été calculé pour laisser passer cette fête musulmane puis éviter la saison des pluies, de juillet à novembre.

« Le ramadan pose une difficulté, il faut le reconnaître« , affirme Pape Khouma. « Les candidats vont devoir réaménager leur emploi du temps dans une période de campagne déjà réduite pour respecter la coupure du jeûne à 19 h, mais nous allons nous adapter« .

Organisation accélérée

Au niveau logistique, le soudain rapprochement du calendrier électoral pose là encore de nombreuses questions. Il intervient alors que Macky Sall a dissous mercredi le gouvernement et nommé le ministre de l’Intérieur Sidiki Kaba – chargé de l’organisation des élections – au poste de Premier ministre à la place d’Amadou Ba, afin que le candidat du pouvoir à la présidentielle puisse faire campagne.

« La bonne organisation du scrutin est essentielle pour garantir sa crédibilité« , rappelle le chercheur Gilles Yabi. « Celle-ci passe par plusieurs critères comme des listes électorales fiables, une information la plus précise possible sur les lieux de vote ou bien encore la possibilité pour les candidats de s’assurer que leurs représentants sont bien présents dans les bureaux de vote. Il ne faudrait pas que les délais resserrés nuisent à cette organisation« .

Sur le plan opérationnel, « tout est prêt », soutient de son côté Pape Khouma. « Avant le report du scrutin, le matériel avait déjà été acheminé, y compris au niveau des consulats à étranger », indique-t-il, confiant quant à la bonne tenue du scrutin.

Un débat politique « absorbé » par la crise

Au sein de l’équipe de Bassirou Diomaye Faye, candidat choisi par le camp d’Ousmane Sonko après l’invalidation de sa candidature, l’annonce de ce scrutin suscite un « franc soulagement« .

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