RETRAIT DE LA MINUSMA DE KIDAL SUR FOND DE TENSIONS ENTRE BAMAKO ET LA CSP-PSD : La guerre est-elle évitable ?
Commencée en août dernier, l’opération de retrait des troupes de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA), de ses différentes bases au Mali, s’est poursuivie le 31 octobre dernier, avec la levée du camp de Kidal.
Un départ accéléré et avant la date initialement prévue du 15 novembre prochain, qui a d’autant plus provoqué le courroux de Bamako que la force onusienne n’a pas attendu l’arrivée des Forces armées maliennes (FAMa) avant de lever son bivouac. Conséquence des courses, l’armée malienne à laquelle la demi-douzaine de camps jusqu’ici libérés ont été rétrocédés par la force onusienne, a été devancée par les séparatistes du Cadre stratégique permanent pour la paix, la sécurité et le développement (CSP-PSD). Ils ont immédiatement investi les lieux de ce camp hautement stratégique à travers lequel Bamako comptait, au-delà de la symbolique, marquer le retour de son autorité et exercer sa souveraineté territoriale sur la capitale rebelle du Nord.
Les risques d’affrontements sont bien réels
C’est dire si c’est dans un climat de tensions extrêmes que s’est déroulé ce retrait de la MINUSMA de son huitième camp au Mali. Des tensions exacerbées par le climat de méfiance et de défiance qui s’est installé entre les signataires de l’accord de paix d’Alger aujourd’hui en profond désaccord sur plusieurs points au point de déterrer la hache de guerre. Mais à présent que la MINUSMA est partie, la question qui se pose est de savoir si la guerre de Kidal est évitable.
La question est d’autant plus fondée que Bamako pourrait voir dans l’attitude de la CSP-PSD, un acte de provocation si ce n’est de réaffirmation de son insoumission à l’autorité centrale. De leur côté, les groupes rebelles du Nord qui ont toujours mis un point d’honneur dans la défense de leur citadelle, n’ont jamais fait mystère de leur opposition à la rétrocession des camps de la MINUSMA à l’armée malienne, ni de leur volonté de ne pas voir les FAMa traîner leurs grosses godasses dans la ville rebelle qui se veut une forteresse inexpugnable.
C’est dire qu’au-delà du symbole, le retrait de la MINUSMA de Kidal pourrait marquer un tournant dans la crise protéiforme que traverse le Mali depuis plusieurs années maintenant. Et en l’absence des forces internationales qui jouaient peu ou prou le rôle de force tampon, il faut craindre que l’exacerbation des tensions avec le ton qui ne cesse de monter de part et d’autre, ne finisse par conduire au déclenchement des hostilités. En tout cas, les risques d’affrontements sont bien réels, avec la volonté d’en découdre militairement qui semble transparaître des deux côtés.
Il convient de trouver un cadre de dialogue sincère pour chercher une solution politique à la crise
Dans ces conditions, la tentation pourrait être grande pour Bamako, ragaillardie par la montée en puissance de son armée en termes d’acquisition d’armements et d’équipements de guerre, et tirant avantage de la reprise des camps de Tessalit et d’Aguelhok, de chercher à en finir définitivement avec le cas Kidal. Mais il faut croire qu’une victoire militaire de l’un ou de l’autre des camps, ne résoudra pas forcément la crise malienne. Au contraire, cela contribuera à accentuer la fracture sociale entre les frères ennemis maliens qui peinent véritablement à trouver un modus vivendi dans l’intérêt supérieur de leur pays. Ils donnent ainsi le sentiment d’oublier parfois l’essentiel qui est la lutte contre l’hydre terroriste.
C’est pourquoi, au moment où les deux armées sont en passe de se retrouver face à face, à défaut de raviver l’accord d’Alger, il convient de trouver un cadre de dialogue sincère pour chercher une solution politique à la crise. Cela est d’autant plus un impératif que derrière la guerre, il y a toujours un vivre-ensemble à reconstruire. Mais quand la déchirure est trop profonde, le tissu de la cohésion sociale est toujours difficile à recoudre. A moins que les motivations des protagonistes ne procèdent d’une stratégie d’occupation du terrain pour pouvoir négocier en position de force.
En attendant, ce sont les pauvres populations civiles qui ont commencé à fuir, qui risquent de payer le plus lourd tribut de cette nouvelle montée d’adrénaline dans la région de Kidal. Prises qu’elles sont entre le marteau des attaques terroristes dont elles souffrent déjà le martyre et l’enclume de ces risques élevés d’affrontements entre les FAMa et la CSP-PSD, dont elles pourraient être des victimes collatérales.
« Le Pays »
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