Un fichier à la veille : un sabotage en costume
Un fichier à D‑30 : une gifle à la logique électorale
Depuis quand un fichier électoral est-il un trophée à exhiber à la dernière minute comme un diplôme acheté au marché noir ? Un fichier, c’est la colonne vertébrale d’un scrutin : on l’élabore, on le teste, on le corrige, on l’expose au peuple pour qu’il y appose sa vigilance. On le polit au feu du débat public, on le certifie sous le regard des experts.
Mais ici, non. Chez nous, en Guinée, on le sort du four sans cuisson, on le brandit comme une victoire divine, et on ose demander au peuple d’en être fier.
Mais fier de quoi, Monsieur le Ministre ?
D’avoir un fichier prêt un mois avant l’échéance ?
De n’avoir laissé aucun temps pour les recours ?
D’avoir confisqué l’éthique pour célébrer la vitesse ?
Non, on ne s’en félicite pas. On en pleure, monsieur le ministre. On pleure l’État de droit, la démocratie, la logique. On pleure tout ce que vous avez enterré avec votre sourire satisfait.
Une mascarade méthodique
À moins d’un mois du vote, aucune carte d’électeur n’a été distribuée. Aucun affichage public. Aucune phase de réclamation sérieuse. Aucune validation indépendante. Aucune opposition consultée.
Mais le ministre parle. Il répète. Il clame : « Le fichier est là. »
Oui, comme une épitaphe sur la tombe de la crédibilité.
Et pendant ce temps, on s’agite à l’intérieur pour graver un “OUI” massif, artificiel, stérile. Une caricature de référendum emballée dans des bulletins imprimés au forceps.
Ce n’est pas un fichier, monsieur le ministre, c’est un permis de triche.
La politique du mensonge chronométré
On ne gouverne pas un peuple par des déclarations creuses à la veille d’une échéance. On ne construit pas la paix par des raccourcis techniques. On ne réconcilie pas une nation en muselant la transparence.
Un vrai fichier se construit dans la durée, dans le consensus, dans la vérité. Pas dans un communiqué précipité diffusé à midi pour justifier une imposture le soir.
À quoi bon recenser, si l’on choisit à huis clos qui comptera et qui comptera pour du beurre ?
Un conseil au ministre : changez de costume ou changez de métier
Vous voulez réussir un scrutin ? Travaillez en amont.
Vous voulez respecter le peuple ? Associez-le.
Vous voulez qu’on vous prenne au sérieux ? Parlez moins, agissez mieux.
Car pour l’instant, vous êtes l’architecte d’un sabotage méthodique. Un démolisseur de confiance. Un pyromane électoral déguisé en technocrate.
Et si vous ne savez pas ce qu’est un vrai fichier électoral, allez faire un stage… au Sénégal, au Cap-Vert, ou même à la mairie de Ratoma. Vous y apprendrez que la démocratie n’est pas une formalité à expédier, mais une promesse à honorer.
On nous dit que « le 21 septembre est une ligne rouge ».
Non monsieur le ministre.
Ce qui est rouge aujourd’hui, c’est votre bilan.
Et ce qu’on redoute désormais…
C’est le sang de la vérité étouffée.
Le peuple n’est pas aveugle. Il vous regarde.
Et s’il ne peut voter librement, il saura parler autrement.
Car en Guinée, même bâillonnée, la colère finit toujours par voter.
Alpha Issagha Diallo

Ancien électeur répertorié deux fois, puis rayé sans préavis.
Actuellement fiché… mais pas convaincu.
Témoin du réel, poil à gratter des ministres pressés,
et survivant guinéen d’un fichier électoral en papier brouillon.
