Contre La sansure

«Une crise sanitaire est plus dommageable pour l’économie qu’un coup d’État»

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À la tête du Conseil national du patronat malien (CNPM) depuis fin 2022, Mossadeck Bally, fondateur de la chaîne hôtelière Azalaï est en première ligne pour porter la voix du secteur privé auprès de la junte militaire au pouvoir. Il est l’invité de l’émission Éco d’ici Éco d’ailleurs ce samedi 16 mars. Extraits.

Tout en nuance et pragmatisme. Mossadeck Bally sait qu’en ces périodes de fortes tensions comme en connaît son pays, il ne sert à rien de heurter le pouvoir. Cela tombe bien, ce n’est pas dans ses habitudes. Depuis sa nomination à la tête du Conseil national du patronat malien fin 2022, c’est notamment lui qui a la charge de porter la voix du secteur privé auprès de la junte dirigée par Assimi Goïta.

Sa méthode : entretenir la confiance. À l’occasion de son passage dans l’émission Éco d’ici, Éco d’ailleurs, le fondateur du groupe hôtelier Azalaï rappelle le conseil que lui avait donné son père : « Le plus grand capital d’un entrepreneur, ce n’est pas de l’argent, c’est la confiance que les autres placent en vous et donc il faut la cultiver ».

Interrogé sur la situation du Mali et plus largement des pays du Sahel passés sous le contrôle de militaires putschistes, le patron souligne la résilience des entreprises. « Certes, ça les ralentit un peu, mais par exemple, mon activité a beaucoup plus souffert des trois ans de pandémie que de toute l’instabilité politique que l’on a vécue. Une crise sanitaire est souvent beaucoup plus dommageable pour l’économie qu’un coup d’État ».

« Il faut au minimum 7 % de croissance et pour l’instant, on ne les atteint pas »

Des crises qui ne sont pas nouvelles et qui se sont multipliées depuis plus d’une décennie, rappelle-t-il : « Cela a commencé par l’enlèvement des otages, ce qui a tué le tourisme de loisirs. Ensuite, il y a eu l’occupation du nord du Mali pendant presque un an. Ebola. Puis des crises institutionnelles avec les coups d’État en 2012 et en 2020. Et après le Covid, l’inflation et les sanctions de la Cédéao. »

S’il salue le courage et l’imagination des chefs d’entreprises pour faire face à ces situations, il reconnait que leur capacité de résilience s’essouffle. « C’est d’ailleurs ce que nous avons dit à Assimi Goïta, le président de la transition, lorsqu’il nous a reçus la semaine dernière », précise-t-il lors de l’enregistrement réalisé le 6 mars.

La croissance a beau avoir été l’an dernier supérieure aux estimations (4,5 % du PIB), Mossadeck Bally constate qu’elle est insuffisante dans un pays dont le taux d’accroissement démographique dépasse 3 %. « La population double tous les 25 ans, or les économistes disent qu’à ce rythme, il faut au minimum 7 % de croissance. Et pour l’instant, on ne les atteint pas. »

Pour y parvenir, l’entrepreneur souhaite que l’environnement des affaires soit plus incitatif. Aux interrogations sur l’attractivité du pays, il répond que le Mali reste un pays ouvert. Marocains, Turcs, Brésiliens, Chinois et même des entreprises françaises comme Total ou Sogea-Satom y font des affaires. Quant aux miniers, moteur de la croissance ces dernières années, ils n’ont pas désinvesti. La production d’or a même augmenté. Mais la réalité, concède-t-il, c’est aussi le vide laissé dans les hôtels et les restaurants par les ONG occidentales, qui ont quitté le pays à la demande des autorités, les coupures d’électricité, nombreuses, qui pénalisent les familles et les entreprises ou encore les groupes terroristes qui empêchent notamment les agriculteurs d’aller aux champs.

« Les Maliens ne peuvent pas s’accommoder d’une transition sans fin »

Même si globalement, Mossadeck Bally juge la situation sécuritaire meilleure qu’elle ne l’était lorsque le pays était dirigé par Ibrahim Boubacar Keïta. « À la tête de l’État, ce sont quand même des militaires. Ils connaissent les faiblesses de l’appareil sécuritaire et ils ont beaucoup investi », dit-il avant de livrer son opinion personnelle : « Tôt au tard, il faudra négocier la paix. »

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