APPELS A DES POURSUITES JUDICIAIRES CONTRE MACKY SALL : Un avertissement sans frais pour les princes régnants
Un mandat d’arrêt international contre Macky Sall ! C’est ce que demande aux autorités judiciaires sénégalaises, le « collectif des victimes du régime du président Macky Sall », du nom de ce regroupement composé de familles de ceux qui ont perdu la vie ou ont été injustement emprisonnés au cours des manifestations de l’opposition.
On se souvient, en effet, que dans les années qui ont précédé l’élection présidentielle au Sénégal, un bras de fer politico-judiciaire a opposé le régime de l’ex-président aux leaders du PASTEF, aujourd’hui au pouvoir, entrainant des manifs de rues et une répression d’une rare violence. Les seules échauffourées du mois de juin 2023, se sont soldées par le bilan astronomique de 16 morts, 400 blessés et plus de 593 arrestations. Et voilà qui devrait donc troubler le sommeil de l’ancien chef de l’Etat qui, depuis la passation de charges, a choisi le Maroc comme pays d’accueil. Mais cette actualité au Sénégal n’est pas sans susciter des interrogations. Le collectif qui appelle à des poursuites contre Macky Sall, n’est-il pas un instrument créé par les hommes aux commandes du pays pour régler leurs comptes avec un régime qui leur a mené la vie dure ?
On finit toujours par rendre compte de sa gestion du pouvoir
Ou tout simplement, ce collectif n’est-il pas une organisation qui veut monnayer la douleur des familles des victimes des violences politiques pour s’approcher du pouvoir et ainsi obtenir leur part du gâteau ? Rien n’est à exclure. Mais quelles sont véritablement les chances que les membres de cette nouvelle structure dans le paysage des organisations de la société civile au Sénégal, soient entendus ? Pour répondre à cette interrogation, l’on est tenté de dire que le collectif prêche dans le désert. Et pour cause.
En effet, dans la mouvance du dialogue politique à la veille de l’élection présidentielle, Macky Sall a fait adopter une loi d’amnistie qui couvre, aux termes même du texte, « tous les faits susceptibles de revêtir la qualification d’infraction criminelle ou correctionnelle commis entre le 1er février 2021 et le 25 février 2024, tant au Sénégal qu’à l’étranger, se rapportant à des manifestations ou ayant des motivations politiques, y compris celles faites par tous supports de communication, que leurs auteurs aient été jugés ou non ». L’homme a donc juridiquement couvert sa retraite et à moins de détricoter cette toile juridique, il est quasiment impossible de le trainer devant les tribunaux comme le souhaitent les membres du collectif.
L’autre raison de croire que des poursuites judiciaires ont peu de chances de prospérer contre l’ancien chef de l’Etat, est qu’il n’est pas dans la tradition du Sénégal de mener la vie dure à ses anciens dirigeants après la passation de pouvoir. A titre illustratif, l’on sait que le président Abdoulaye Wade avait passé la main presque dans les mêmes conditions, sans être inquiété. Et pour terminer sur cette question des chances de voir Macky Sall trainé devant les tribunaux, l’on peut d’autant plus être sceptique qu’une procédure judiciaire pourrait, ne pas épargner les tenants actuels du pouvoir.
La rançon de la mauvaise gouvernance, est souvent l’exil
Les manifs de l’opposition, en effet, se sont parfois déroulées en violation des lois de la République et les témoignages rapportent des scènes de violences orchestrées par les manifestants tels les saccages de biens publics et l’usage d’armes à feu. Cela dit, si Macky Sall peut échapper, pour l’instant, à la justice des hommes, il ne peut se soustraire à au moins trois autres types de tribunaux : celui de la conscience, celui de l’histoire et enfin celui de Dieu. Et cela confirme que l’on ne peut verser impunément le sang de ses semblables. Et c’est en cela qu’il y a des leçons à tirer et cela, particulièrement de la part des princes régnants.
Et la principale leçon est que la roue de l’histoire tourne si bien que l’on finit toujours par rendre compte de sa gestion du pouvoir. Même si, pour l’instant, officiellement, Macky Sall n’est pas en exil, la rançon de la mauvaise gouvernance, est souvent l’exil. Et les exemples sont légion. L’on pourrait se limiter aux seuls cas du Guinéen Dadis Camara contraint de vivre au Burkina avant d’aller répondre de ses faits et gestes devant les tribunaux de son pays ou encore celui du tout-puissant Mobutu Sésé Seko mort sur les sentiers de l’errance au Maroc.
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