Contre La sansure

Retour à l’ordre constitutionnel, dialogue inclusif, nouvelle constitution : François Loucény Fall à cœur ouvert

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Loucény Fall et Alpha Madiou BAH
Loucény Fall et Alpha Madiou BAH

 

Dans cette première partie de l’entretien exclusif qu’il a accordé à un journaliste de notre rédaction, le leader du parti UNPG livre sa lecture sur la conduite de la transition, notamment les dernières sorties du Premier ministre Amadou Oury Bah qui milite en faveur d’un glissement du calendrier de la transition. Avec François Loucény Fall, nous avons aussi parlé du dialogue inclusif annoncé par le chef du Gouvernement Bah Oury, mais aussi, de la nouvelle constitution qui tarde à être présentée au peuple de Guinée par le Conseil national de la transition (CNT).

LEREVELATEUR224.COM : Monsieur François Loucény Fall, merci de nous recevoir chez vous. Vous êtes au pays depuis quelques jours. Avant d’aborder la question de la transition dans le fond, d’abord, quels sont vos rapports avec les autorités du pays ?

FRANÇOIS LOUCENY FALL : Je n’ai pas de rapports conflictuels avec les autorités du pays, quoi que j’ai des rapports de respect avec les autorités du pays, je n’ai aucun problème avec eux.

Nous nous acheminons vers la fin de la transition en décembre 2024. Sauf que, jusqu’à présent, elle patine. Comment vous analysez la gestion de la transition par le CNRD et son Gouvernement ?

La transition entre maintenant dans une phase décisive. Conformément aux engagements qui ont été pris avec la CEDEAO et avec la classe politique. Normalement, on devait avoir les élections à la fin de cette année. Donc, la fin de la transition, il y a encore beaucoup d’interrogations, nous sommes au mois de mai, il reste peut-être sept (7) mois maintenant pour y mettre fin. Et les tâches à accomplir pour avoir des élections sont nombreuses et complexes. Quand on voit il faut faire des élections locales, des élections législatives, ensuite, les élections présidentielles, est-ce que tout cela sera possible d’ici la fin de cette année ? C’est la grosse interrogation.

Vous avez certainement entendu le Premier ministre Bah Oury s’exprimer à plusieurs reprises, sur une possibilité d’aller vers un glissement du calendrier de la transition. Qu’en pensez-vous ?

Moi je me suis déjà prononcé sur cette question deux fois. La première fois, lorsqu’il a fait l’interview avec RFI, j’ai réagi, j’ai exprimé mon étonnement, surtout venant d’un premier ministre dont j’ai salué l’arrivée à la Primature, compte tenu de son passé de combattant pour la restauration de l’ordre constitutionnel en Guinée. J’ai trouvé que cette déclaration était inopportune, je l’avais indiqué à cette période là. Et récemment, il a tenu une conférence de presse, je l’ai suivi également, il a répété les mêmes choses, où il est même allé au-delà, en parlant de programme que le Gouvernement doit accomplir dans 2, 3 ou 4 ans. Ce qui est encore plus inquiétant. Je pense que le premier ministre a fait une déclaration malencontreuse.

Le glissement de calendrier nous le percevons déjà, les tâches qui sont inscrites dans le chronogramme ne sont pas accomplies complètement, il reste beaucoup à faire. Est-ce qu’ils seront capables de le faire en sept (7) mois ? Moi j’en doute très fort. Mais cependant, puisque c’est sur la base consensuelle avec la CEDEAO que le délai a été fixé, il aurait été mieux que le Gouvernement discute avec la CEDEAO, avec la classe politique surtout, pour continuer le cadre de dialogue. Et, au sein de ce cadre de dialogue, nous pouvons faire le point. S’il y a un glissement qui doit être annoncé, alors, ça doit être d’accord parties. Mais la manière dont le premier ministre l’a annoncé, je pense que ce n’était pas une manière élégante, c’est pour cela il est sous le feu de toutes les supputations aujourd’hui.

Pour le Premier ministre, il ne faut pas se précipiter. Bah Oury pense qu’il faut aller doucement et efficacement, pour éviter les erreurs du passé et permettre au pays d’avoir des institutions et des instruments forts, pour conduire le pays vers une stabilité politique. Et tout cela, dit-il, en passant par le RAVEC et le RGPH4. Êtes-vous d’accord avec lui?

Pour notre part, c’est notre souhait aussi. Nous voulons une transition apaisée, cela est évident. Mais s’il y avait une volonté politique, ça fait maintenant plus de deux (2) ans, mais deux ans déjà que les accords ont été faits avec la CEDEAO. Si le Gouvernement s’était mis à la tâche, certainement qu’on aurait accompli beaucoup de points de ce chronogramme. Mais, rien n’a été fait, il y a eu le manque de volonté évident de la part du Gouvernement. Et venant de BAH Oury, je suis étonné, parce que c’est un fin connaisseur des périodes de transition. Nous avons mené la bataille ensemble en 2009 et 2010, pour le retour à l’ordre constitutionnel. Il était même un des éléments clés des forces vives. Et lui qui dit aujourd’hui qu’il faut aller lentement, je pense que lui est là pour un court moment normalement. Certainement qu’il veut prolonger son séjour à la Primature, c’est ce que les gens pensent, raisonnablement, on peut le penser, mais il aurait tort de le faire, parce que là, il fait dos à tout ce qu’il avait incarné dans le passé. On se rappelle encore de tout ce qu’il disait concernant les transitions, il n’y a pas longtemps, mais qu’il y ait cette position nouvelle qu’il adopte, cela paraît très, très étrange.

Donc, en résumé, vous pensez qu’il y a des appétits derrière ?

Écoutez, vous savez, nous avons connu ça avec l’ancienne transition avec Jean-Marie Doré. La transition avait été fixée, nous nous étions mis d’accord qu’on devait faire la constitution, le CNT d’alors avait fait du bon travail, et la transition devait finir en juin. Au moment où le CNT terminait son travail, la constitution était prête. Et moi j’étais porte-parole des forces vives à l’époque, nous avons eu toutes les difficultés avec Jean-Marie Doré, pour faire adopter cette constitution, en la promulguant. Il disait que nous étions pressé, mais nous n’étions pas pressé, ce sont les termes qui ont été convenus, c’est sur la base de ces termes là que lui-même avait été nommé premier ministre. Mais une fois que les gens sont au poste en général, ils oublient les raisons qui les ont amenés là. Et c’est là le problème.

Le Premier ministre a annoncé un dialogue politique, avec un format différent pour plus d’inclusivité. Histoire de faire participer ceux qui n’étaient pas autour de la table au départ. Comment réussir le pari à votre avis ?

Vous savez, moi j’ai consacré une bonne partie de ma vie à la prévention des conflits. Dans tous les pays où j’ai travaillé, j’ai toujours recommandé des dialogues, et surtout, des dialogues inclusifs. Parce que quand vous faites un dialogue dans un pays, s’il n’est pas inclusif, il y a toujours des problèmes. Si les grands partis ne participent pas, ça laisse un trou.

En Guinée ici, j’ai eu l’avantage de présider un dialogue politique. En 2013, vous vous rappelez qu’après l’élection du président Alpha Condé, il était impossible d’organiser des élections législatives, parce qu’il y avait beaucoup de problèmes, touchant à la composition de la CENI et tant d’autres. Il y a eu beaucoup de violences à Conakry. Les partis politiques se sont mis d’accord, ils m’ont proposé comme président du dialogue, je l’ai présidé. En trois jours, ce qui n’avait pas pu être résolu en plusieurs années, nous avons trouvé une solution. Mais, le dialogue était inclusif. Et les partis sont venus, nous les avons écoutés on a trouvé une solution.

Dans d’autres pays en Afrique, j’ai organisé des dialogues également, comme au Gabon, où le dialogue n’a pas été inclusif, et ça laissé des traces. Je crois que le dialogue en Guinée doit être inclusif. Je salue cette volonté du Premier ministre que le dialogue soit inclusif. Alors, il doit prendre toutes les mesures, pour que tous les acteurs soient autour de la table. Et même nous, nous n’étions pas là au début, moi je suis déterminé à participer au dialogue, je suis un homme de dialogue, j’ai toujours prôné le dialogue, je ne ferai jamais la politique de la chaise vide, je serais présent à tous les dialogues qui seront appelés.

Et si on vous demandait de faciliter la participation à ce dialogue de Cellou et de Sidya, qui sont vos amis, nous le savons, allez-vous l’accepter ?

Ce sont des amis à moi, c’est connu de tous. Le président Alpha Condé est mon grand frère également. Je crois que dans ma position d’aujourd’hui, je ne peux pas être un intermédiaire. Je suis une partie intégrante à cette situation, donc, je ne peux pas jouer ce rôle. Si je n’étais pas leader d’un parti politique aujourd’hui, si j’étais dans mon indépendance normale, si on m’avait demandé de mettre mes connaissances et mes relations au service de la paix, je l’aurais fait. Mais n’empêche, je rencontre souvent ces personnes à l’étranger. Cellou Dalein, Sidya, je parle souvent avec eux. Mais il appartient au Gouvernement de prendre des mesures, pour que ce dialogue soit inclusif. Je le souhaite vivement.

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