« Tout magistrat qui arrêtera sera considéré comme celui qui a abandonné son poste… »

Le ministre de la Justice et des Droits de l’Homme, Alphonse Charles Wright, menace les magistrats guinéens, appelés par leur syndicat, l’Association des Magistrats de Guinée (AMG), la semaine dernière, « à cesser immédiatement toute activité sur toute l’étendue du territoire national,… ».
Ce lundi matin, invité à l’émission Mirador de FIM FM, le ministre Wright a souligné que « tout magistrat qui arrêtera le travail sera considéré comme celui qui a abandonné son poste (…) on en tirera toutes les conséquences. Pour le moment les magistrats continuent à vaquer à leurs obligations parce qu’ils savent qu’ils ne peuvent pas réclamer la légalité en violant la légalité ».
Et il insiste : « Je ne rapporterai aucun arrêté. Il faut que cela soit compris dans la tête de tout le monde. L’arrêté a été pris dans la légalité. Moi j’ai saisi le conseil, j’ai du respect pour les membres du Conseil supérieur de la magistrature, ils décideront les décisions qu’ils souhaitent ».
Pour un observateur, « Charles Wright s’est engagé sur une piste dangereuse au moment où le gouvernement et le CNRD sont impopulaires, ont perdu toute légitimité. La majorité des guinéens soutient l’AMG et espère que des gens comme ce ministre, ou encore Ousmane Gaoual, Béa Diallo, etc. vont être démis. Le jour que Doumbouya comprendra que son régime aura à gagner à se débarrer des Idi Amin, Balla Samoura, il le fera sans hésiter. Mais dans cette affaire, Charles Wright cherche à briser l’élan de l’AMG pour la personnaliser, et faire croire que c’est un conflit entre lui et le président de l’AMG, le juge Mohamed Diawara ».

Sur ce point, le Ministre de la Justice et des Droits de l’Homme explique :« Il n’y a jamais eu de bras de fer entre le ministre de la justice que je suis et l’association des magistrats…. Le bureau exécutif de l’association des magistrats, géré par un président émotionnellement instable qui n’arrive pas à fédérer l’intérêt des magistrats (…) La première fois que j’ai eu une rencontre de convivialité avec celui qui s’est fait passer comme le président de l’association des magistrats, c’est lorsqu’il est venu à mon bureau au lendemain de ma prise de fonction. Il dit qu’il veut être procureur général puisque moi j’ai déjà quitté la cour d’appel qui est resté à un moment donné sans procureur. Il est venu poser son problème ».
« Il a parié sur un mauvais cheval… »
Poursuivant, le ministre Charles Wright indique : « chacun est libre de poser son problème au ministre, je reçois pas mal de problèmes. Mais en faire de cela une cause non avouée pour des intérêts personnels, c’est ce qui me pousse à clarifier l’opinion (…) Je lui au dit que je ferai mes propositions et le conseil supérieur va examiner, moi je n’ai pas de problème. J’ai été clair avec lui, je ne peux pas vous proposer comme procureur général. Pour quelle raison ? Un magistrat ne vient pas demander un ministre mettez moi là-bas. (…) Il a parié sur un mauvais cheval…»
De l’avis d’un juriste, « cette fois-ci, plus que les autres fois, Charles Wright est allé droit au mur. Il n’a pas raison et, pire…, il révèle une histoire, vraie ou fausse, qui s’est passée entre lui et le Juge Diawara. Est-ce vraiment le moment et le lieu de le dire ? Si le président de l’AMG avait entamé une telle démarche aurait-il affronter le ministre Wright ? Et puis, ne l’oublions pas, Charles Wright a annoncé il y a quelques semaines, qu’après le gouvernement, il démissionnera de la corporation des magistrats… la même qui, avec à sa tête Mohamed Diawara, l’avait défendu alors qu’il était procureur général près la Cour d’appel de Conakry, dans son conflit contre le Haut commandant de la gendarmerie Balla Samoura, mais ça, il l’a oublié. Reste à savoir ce que Doumbouya et ses camarades du CNRD vont décider. Reste également à savoir si la corruption de certains magistrats ne viendra pas casser le mouvement. On ne sait jamais avec nos magistrats qui ont offert à Alpha Condé son 3ème mandat« .