Après la rébellion d’Evguéni Prigojine, quel avenir pour Wagner en Afrique ?
Deux jours après la rébellion de Wagner, Sergueï Lavrov a assuré lundi que le groupe paramilitaire continuera « ses opérations au Mali et en Centrafrique« . Une mise au point du chef de la diplomatie russe qui intervient alors que les experts s’interrogent sur l’avenir de cette milice privée, fer de lance du nouvel expansionnisme russe en Afrique.
La crise entre Wagner et le Kremlin va-t-elle mettre un coup d’arrêt à cinq années d’expansionnisme russe en Afrique ? Après la rébellion avortée d’Evguéni Prigojine, les questions se multiplient autour de la présence de la milice privée sur le continent qui, depuis 2018, a tissé sa toile du Soudan à la Centrafrique, en passant par le Mali et la Libye.
Moscou s’est voulu rassurant lundi 26 juin, assurant que les « événements » du week-end dernier ne changeront rien aux activités du groupe sur le continent. Les membres de Wagner travaillent au Mali et en République centrafricaine « comme instructeurs. Ce travail va bien sûr continuer« , a déclaré Sergueï Lavrov dans un entretien à la chaîne RT.
Sergueï Lavrov a en outre estimé que la rébellion armée du chef de Wagner, Evguéni Prigojine, et de ses hommes déployés en Ukraine n’allait rien changer aux relations de la Russie avec ses alliés. « Il y a eu beaucoup d’appels (de partenaires étrangers) au président (Vladimir) Poutine (…) pour exprimer des mots de soutien« , a-t-il dit.
Officiellement, aucune capitale africaine n’a commenté les événements du week-end dernier. Mais selon Cyril Payen, grand reporter à France 24, la Russie « apparaît sans doute comme un partenaire un peu moins sûr » depuis la rébellion de Prigojine. « On peut gager qu’à Bangui et Bamako, on se demande quel sera l’avenir. »
« L’État malien est en effet aujourd’hui engagé dans un double partenariat, avec l’État russe – le camp Poutine – et avec le groupe Wagner – le camp Prigojine. Ce qui, jusqu’à présent, ne faisait pas grande différence, mais qui pourrait changer si les deux camps ne se réconciliaient pas durablement« , estime auprès de RFI l’avocat et politologue Oumar Berté.
Intérêts imbriqués
Interrogé par l’AFP, un haut responsable de la présidence centrafricaine indique toutefois que la Russie continuera d’opérer en Centrafrique, avec ou sans Wagner. « La République centrafricaine a signé (en 2018, NDLR) un accord de défense avec la Fédération de Russie, et non avec Wagner« , a déclaré Fidèle Gouandjika, ministre conseiller spécial du président centrafricain Faustin-Archange Touadéra. « La Russie a sous-traité avec Wagner. Si la Russie n’est plus d’accord avec Wagner, alors elle nous enverra un nouveau contingent. »
Tête de pont des ambitions russes sur le continent, la Centrafrique est particulièrement dépendante de la milice russe dont les hommes vont jusqu’à servir à la protection personnelle du président Faustin-Archange Touadéra.
Présents depuis 2021 au Mali où Wagner compte environ 1 500 hommes, le groupe paramilitaire a également noué des relations étroites avec la junte au pouvoir, participant à la formation des militaires ainsi qu’aux opérations de lutte contre les groupes terroristes.
En Afrique, les hommes de Prigojine ont aussi été identifiés en Libye, au Soudan ou encore au Mozambique. Depuis l’arrivée de Wagner en Afrique, le groupe paramilitaire est régulièrement accusé par l’ONU, les ONG internationales et Paris de commettre des exactions et des crimes contre les civils.
Par Grégoire SAUVAGE
In. https://www.france24.com/fr/afrique/20230627-apres-la-rebellion-de-prigojine-la-presence-russe-en-afrique-en-question