Une autre forme de contestation doit impérativement naître en Guinée . (Par Aissatou Cherif Baldé-Diallo).

La faible crédibilité de la constitution et de la justice constitutionnelle guinéenne, vitrines d’une « démocratie émasculée; voulue et entretenue par le gouvernement actuel, expliquerait d’une part cette tendance actuelle.
Et c’est aussi à travers la complicité ou la complaisance de l’opposition politique élargie sur fond de dialogues et des accords superficiels qui conduisent par conséquent au bafouement en permanence de la constitution guinéenne qui devrait pourtant être la norme qui fixe le statut de l’État et qui assure l’encadrement juridique de son pouvoir.
Pourtant, on sait pertinemment que la substitution des accords politiques aux lois de la République et de la constitution et surtout dans le cadre d’un contentieux électoral, avec un gouvernement qui ne respecte jamais l’esprit de la loi, la constitution ne peut en aucun cas assurer l’applicabilité d’un quelconque accord politique.
Nous savons aussi que de tels accords signés dans un contexte d’une transition politique, d’une alternance politique pour assurer la stabilité sociale, entravent fortement le processus de démocratisation en Guinée.
Les acteurs politiques sans convictions et valeurs morales
Et en analysant la situation actuelle de ce pays nous avons l’impression de n’avoir que des acteurs politiques guinéens assoiffés de pouvoir, qui brillent entre incohérence, manque de conviction, de valeurs morales, de clarté et de clairvoyance.
Sinon comment expliquer le débauchage des cadres de l’UFDG et du RPG depuis le putsch militaire du 05 septembre 2021?
Ce retournement de veste des cadres de ces deux grands partis politiques du pays prouve qu’en Guinée la conviction politique, les principes, les valeurs morales, les attitudes démocratiques ne comptent pas. Tout tourne autour des intérêts égoïstes et égotiques.
Et pour ce faire, il faut faire usage de tous les moyens néfastes et illégaux pour garder ses privilèges, quitte à trahir la mémoire des martyrs.
Quant au soutien de certains partis politiques satellites au pouvoir militaire, avec une faible taux de mobilisation sur fond d’opportunisme politique, la politique du ventre, pour permettre à la junte de confisquer le pouvoir, met à nu les maux qui gangrènent le paysage politique guinéen.
Et cette attitude opportuniste, antidémocratique de ces leaders met aussi en exergue, l’incapacité des grands partis d’opposition guinéens à mobiliser au-delà de leur fief traditionnel, à se renouveler et à convaincre.
Les grands partis politiques n’incarnent pas leur discours
Il faut surtout admettre que les grands partis d’opposition n’arrivent pas à incarner leurs discours et ils sont loin des standards de partis démocratiques qu’ils prétendent être.
On retrouve les mêmes têtes, à croire que ces partis politiques sont dépourvus d’élections primaires permettant aux militants de choisir si possible une icône représentative.
Mieux on s’accroche surtout sur les clivages et cela retarde l’accomplissement de l’objectif principal de l’action politique qui est d’avoir de l’impact sur la vie des citoyens guinéens.
D’aucuns diront que les partis politiques souffrent des contraintes objectives parmi lesquelles la nature autoritaire du régime guinéen, la fermeture des médias privés, d’espaces d’expressions, les tentatives de déstabilisation.
Face à une opposition redoutable aucun regime autoritaire ne saurait résister
Pourtant face à une opposition redoutable, structurée qui parle pour le peuple et non pour un clan sur fond de clientélisme, de clanisme, aucun regime autoritaire ne saurait résister.
Cela exige bien évidemment de d’abord trouver une stratégie permettant de se rassembler, se rapprocher afin de trouver un consensus autour de l’alternance et transition démocratique en Guinée.. Et cela passe par l’acceptation de leurs différences, de leurs divergences afin de parvenir à une alternance voire une alternative démocratique apaisée, mais aussi et surtout par la mise en place d’un leadership et management capable d’élaborer et exécuter une telle stratégie.
Une chose qui s’avère difficile voire impossible au sein de l’opposition élargie, puisque l’intérêt partisan prime sur celui du peuple.
Or c’est le leadership seul qui définit la vision et le cadre des grandes orientations stratégiques d’un mouvement ou d’une organisation n’importe laquelle.
Et cela fait défaut aujourd’hui en Guinée, puisque l’opposition politique élargie est minée de l’intérieur par la guerre des égos et des intérêts et c’est pour cela d’ailleurs que le combat n’est que de surface et le seul perdant demeure le peuple.
Le contentieux qui oppose l’UFDG à son ancien cadre Ousmane Gaoual Diallo atteste cet état de fait. Car M Ousmane Gaoual Diallo ministre du gouvernement de transition et porte-parole met tout en œuvre pour soit récupérer le parti à défaut pousser à sa dissolution.
Une nouvelle forme de contestation est nécessaire
En somme pour sauver la république, une nouvelle forme d’opposition à l’image de 2006 et 2007 émergeant de la rue s’impose face à ce régime kleptocrate de Conakry.
Cette forme de contestation va rompre avec les codes classiques de l’espace politique guinéen en apportant vigueur et fraîcheur.
Car la Guinée ne mérite plus d’être dirigée par une opposition qui n’est pas crédible, par sa vacuité programmatique, sa similitude avec les pouvoirs qu’elle combat, son impossibilité à drainer l’espoir.
Cependant tout n’est pas qu’archaïsme et rigidité mal placée, tout n’est pas tendu vers le passé dans le tissu d’acteurs qui constitue la société civile et les partis politiques sur fond d’entrepreneuriat politique.
Nous avons encore une grande possibilité de regain de mobilisation et de nouvelles actions car la tension est palpable malgré l’autoritarisme étouffant.
Il est alors temps de reprendre la main dans ce pays, à défaut nous continuerons d’être dirigés par des kleptocrates, ces adeptes du pouvoir des pires.